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26 novembre 2011

Droit de vote des étrangers : Osons !

Dans un revirement dont il a seul le secret, Nicolas Sarkozy, devant 3 000 maires de France réunis à l'Élysée, s'est opposé à l'idée d'élargir le droit de vote aux étrangers venant de pays en dehors de l'Union Européenne (cf L'Express). Il entend ainsi s'opposer aux socialistes qui l'ont inscrit dans leur programme de gouvernance pour 2012, mais aussi au Modem qui avait inscrit la proposition dans son Projet humaniste dès 2009.

C'est un revirement car on se souvient qu'en 2005 dans un ouvrage, Libre, et quelques interviews, ce même Nicolas Sarkozy disait ne pas être choqué par une telle perspective. Oui, mais voilà, la stratégie électorale de 2012 n'est plus celle de 2007, et la menace Marine conjuguée aux pressions de la « Droite populaire » ont eu raison de ces libres pensées.

L'argument principal des opposants au droit de vote des étrangers hors UE que reprend Nicolas Sarkozy est celui de la nationalité. Assénant l'assertion suivante : « Seuls les Français peuvent voter en France ».

C'est simple, carré, sans ambiguïté... mais faux.

Tout d'abord, une telle affirmation, comme encore énoncée avec grande médiocrité par Arno Klarsfeld dans le journal Le Monde, semble valoir, de la part de leurs auteurs, vérité universelle et intemporelle. Ce ton péremptoire n'est en réalité qu'une manière de vouloir couper court à tout débat afin d'éviter que ne puisse être mis en lumière le triple aveuglement (ou triple mensonge) sur lequel est bâti ce paralogisme.

Aveuglement car aujourd'hui on compte plus d'une vingtaine de pays dans le monde qui accordent ce droit aux étrangers qui vivent sur leur sol. Non seulement des pays européens comme les pays du Bénélux, les pays nordiques de l'UE, ou encore la Slovénie, mais aussi des pays africains (Burkina, Malawi), sud-américains (Chili, Colombie), océaniens (Nouvelle-Zélande) et asiatique (la Corée du Sud).

Malheureuse cessité qui fait que la patrie des droits de l'homme n'est pas capable d'octroyer un droit que le Malawi accorde. L'UMP nous rétorquera le besoin actuel de « cohésion nationale » ou comme notre cher président le « risque de diviser les Français» . Certes, mais que je sache le fait que les étrangers votent au Pays du matin calme n'a en rien altéré le patriotisme coréen, et l'électorat français de Auckland n'a pas affaibli la ferveur néo-zélandaise à porter le maillot des Blacks !

Aveuglement encore, car c'est un argument qui se trouve contredit par la propre Constitution française. En effet, suite au Traité de Maastricht la France a dû accorder en 1992 le droit de vote aux élections municipales à tous les citoyens européens qui vivent en France. Aussi proche soyons-nous des Italiens ou des Allemands avec qui nous partageons la citoyenneté européenne (et non française), ils n'en restent pas moins des étrangers ! Le droit de vote est déjà ouvert aux étrangers et celui-ci n'a donc rien à voir avec la nationalité !

Enfin, ignorance ou paralysie oculaire de la part de gens qui s'acharnent depuis plusieurs années à rogner les heures de cours d'Histoire dans le secondaire, une lecture de la première constitution française de 1793 leur aurait appris qu'il était dans les gènes même de la République que d'élargir les droits de citoyen à tous les habitants en France et cela indépendamment de leur nationalité. Ainsi dans l'article 4 est-il écrit que « tout étranger de vingt et un ans, qui, domicilié en France depuis une année, y vit de son travail(...) est admis à l'exercice des Droits de citoyen français». Mais est-ce que les idéaux de la Révolution sont encore en odeur de sainteté du côté de l'Élysée ?

Depuis la Grèce antique déterminer les bénéficiaires du droit de vote a toujours était un enjeu démocratique : fortune, classe, sexe, race, âge, néanmoins l' idéal démocratique a toujours porté en lui le sens d'un élargissement optimal du corps électoral et personne aujourd'hui n'aurait idée de contester l'abandon du cens ou l'octroi du droit de vote aux femmes. A l'inverse les régimes les plus réactionnaires ont toujours cherché à conscrire ce droit et, dès qu'ils en avaient l'occasion, à revenir dessus. L'élargissement du droit de vote pour les étrangers s'inscrit dans cette évolution.

Le respect de nos valeurs démocratiques devrait donc nous pousser à octroyer ce droit à des personnes qui vivent parmi nous, sont confrontés aux mêmes difficultés et sont tout autant que nous en droit de demander des comptes sur la gestion des impôts desquels ils s'acquittent.

Mais plus concrètement une société a aussi tout intérêt à laisser s'exprimer ses étrangers par la voie électorale : on ne peut délaisser des pans de notre territoire sans représentation réelle de ses habitants sous prétexte que ceux qui y demeurent n'ont pas la nationalité française. Car dans une démocratie il y a un lien évident entre représentation politique et action publique, c'en est même le moteur. Ce n'est donc pas qu'une faute morale, c'est une faute de gouvernance, et cette faute nous la payons aujourd'hui dans de nombreux quartiers.

Il est d'ailleurs surprenant que ceux-là même qui conspuent le manque « d'intégration » des étrangers soient les premiers à leur en refuser l'un des éléments constitutifs.

Il est surprenant de voir des politiques se plaindre de la faible autorité de certains parents et de ne rien faire pour leur donner un minimum de dignité citoyenne.

Reconnaître le droit de vote aux étrangers ne signifie pas pour autant ne pas en discerner les risques et difficultés. Sans tomber dans l'islamophobie hystérique de certains il clair qu'il ne suffit pas de mettre les pieds en Démocratie pour être converti à ses vertus (ce qui soit dit en passant n'a aucune importance, beaucoup de Français en désamour avec la démocratie votent !), mais surtout pour en connaître ses usages et particularismes locaux.

Voter c'est faire un choix, se définir en fonction de connaissances qu'il est indispensable d'acquérir. On apprend autant à devenir démocrate qu'on apprend la vie politique d'un pays.

Le Français natif a 18 ans pour se forger une conscience politique avant d'exercer son droit. Il serait donc naïf et dangereux de croire qu'un étranger soit en mesure de se faire une opinion dès sa première campagne électorale. Il est donc nécessaire qu'il ait pu prendre le temps, entre 5 et 10 ans, de s'acclimater aux moeurs politiques françaises, d'apprendre les idéologies, les programmes, de repérer les mensonges et les menteurs... avant de pouvoir exercer son droit de vote en électeur éclairé.

Mais cette latence ne peut être remplacée ou confondue avec la possibilité parallèle d'être naturalisé comme le suggère l'UMP. Ce sont deux démarches disjointes : le vote tenant du droit démocratique, la naturalisation de l'aspiration personnelle.

La France a aujourd'hui plus que jamais besoin de relancer sa marche en avant vers plus de démocratie sous peine de sclérose ou de recul. Le droit de vote des étrangers est un de ces pas. Alors osons le !

Alexandre Joly.

 

21 novembre 2011

Le Modem en Europe du Sud-Est

Les adhérents du Modem en Turquie, Grèce et à Chypre, viennent de lancer, sous l'impulsion de leur responsable Jean-Michel Foucault, leur blog. Voir ici.

L'équipe du Modem Japon se joint à moi pour leur souhaiter bonne chance et forte audience.


Alexandre Joly.