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03 mars 2007

Où l'on reparle du Yasukuni

Le sanctuaire du Yasukuni fait reparler de lui après que 11 Sud-Coréens aient décidé lundi 26 février de porter plainte contre l'association religieuse qui le gère.

Ce temple shintô indépendant mais qui n'est pas affilié à l'association des sanctuaires shintô du Japon est au coeur de Tokyo. Construit initialement en 1869 sous le nom de Tokyo Shokonsha pour honorer les morts de la guerre civile qui prenait fin, il est rapidement devenu le lieu de repos des âmes de tous les soldats morts lors des guerres japonaises. Rebaptisé Yasukuni Jinja (Le temple du pays apaisé) en 1879, y reposent aujourd'hui l'âme de presque 2 500 000 personnes.

Accusé par certains d'avoir fait la promotion du nationalisme nippon pendant sa période militariste jusqu'en 1945, le temple a surtout commencé à susciter la polémique en 1978 : En octobre, son responsable d'alors, Nagoyashi Matsudaira, décida d'y faire reposer 14 anciens criminels de guerre de Classe A, jugés lors du procès de Tokyo à la fin de la Deuxième Guerre Mondiale. 7 d'entre eux comme l'Amiral Tojo avaient été condamné à mort et ceux-ci possédaient déjà « leur » temple.

Cette décision eut pour effet d'entrainer l'arrêt des visites au temple de l'Empereur Hirohito qui ne l'approuvait pas mais ne put officiellement le dire : La Constitution d'après guerre lui interdisant d'interférer dans le débat politique national.

Si de nombreuses personnalités, dont des premiers ministres en exercice, continuèrent à se rendre au temple, elles le firent dans un cadre dit privé : La Constitution laïque du pays interdisant à un Premier ministre de faire une telle démonstration religieuse.

Mais les polémiques prirent une toute autre dimension avec les visites de Koizumi (2001-2006) : Tout d'abord celui-ci lors de sa campagne pour le leadership du P.L.D. avaient fait campagne auprès des associations de familles d'anciens soldats en leur promettant de s'y rendre s'il était élu Premier ministre; en second point il a toujours laissé planer un doute sur le caractère privé ou non de ses visites jusqu'à s'y rendre le 15 août 2006, le jour de la commémoration da la fin de la guerre au Japon. Cela eut évidemment des répercussions importantes et desastreuses sur les relations entre le Japon et les pays victimes du colonialisme japonais (Chine, Corées..).

Aujourd'hui, avec la plainte de ces 11 Coréens, c'est le mode de désignement du choix des âmes et leur gestion qui posent problème. Le temple décide en effet seul des âmes qu'il veut honorer ou bien comme ce fut le cas en 1959, c'est le gouvernement qui en décrète la liste. Sont ainsi inscrits au panthéon du temple, à la fois les âmes de simples soldats, celles d'infirmières ou de civils ayant servi leur pays comme celles de criminels de guerre (choisis par le temple) ou de soldats enrôlés de force (choix du gouvernement). Dont des Coréens.

C'est cet amalgame que les plaignants entendent dénoncer. Ils s'appuient sur l'article 20 de la Constitution et son aspect laïque contre cet enrôlement de force des «âmes» par le gouvernement. Ils font aussi valoir le droit à la liberté religieuse garantie par l'article 13, pour libérer les non-shintô du temple. Mais leur requête a peu de chances d'aboutir. En effet une plainte similaire avait été rejeté par un tribunal du district de Tokyo en mai 2006 sous prétexte que des accords signés en 1965 entre le Japon et la Corée avaient réglé le litige des listes de « morts à la guerre ».

Autre cas : Celui des morts... bien vivant. Le Japan Times du 27 février raconte l'histoire de Kim Hee Jong, 81 ans, pour qui la gestion du temple est à remettre en cause. Ce Coréen avait en effet eu la surprise en juillet 2006 de voir son nom sur la liste des morts pour le Japon. Il demanda donc que celui-ci soit retiré, mais en revenant quelques mois plus tard il s'aperçut que cela n'avait pas été fait et demande donc aussi réparation.

Le Yasukuni n'a donc pas encore fini de faire parler de lui. Surtout que le nouveau Premier ministre Shinzo Abe ne s'est toujours pas prononcé sur sa décision d'une éventuelle visite personnelle du sanctuaire ou non.

Alexandre Joly.

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