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01 février 2012

Des futurs députés des Français de l'étranger

Lors des prochaines élections législatives, nous, Français de l'étranger, pourrons pour la première fois élire directement des députés censés représenter les circonscriptions regroupant nos pays de résidences respectifs. C'était une promesse de Nicolas Sarkozy, elle fût inscrite dans la Constitution.

Et même si les frais de remboursement pour cette campagne atteignent des sommes clairement scandaleuses dans un pays en crise, si le mode de scrutin est toujours imparfait (mais il a le mérite d'être calqué sur la métropole) et si le nombre et le découpage des circonscriptions est contestable, nous ne pouvons que nous réjouir de pouvoir effectuer notre droit élémentaire de citoyen.

Cependant, à aucun moment ne fût poser la question de la pertinence du rôle d'un député des Français de l'étranger et encore moins celle de la notion de représentativité. Questions d'autant plus pertinentes que grande est la circonscription, telle la 11ème des Français de l'étranger qui regroupe 49 pays répartis sur 3 continents.

L'une des spécificité des Français de l'étranger qui nous différencie de nos concitoyens de métropole et d'Outre-mer est que nous nous caractérisons par une diversité de statuts , non seulement aux yeux de la République, mais aussi et surtout en fonction de nos pays de résidence.

Ainsi dans les 9, 10 et 11èmes circonscription étendues sur plusieurs continents, aux sociétés et économies si radicalement divergentes, et donc aux modes de vie et problématiques si variées pour nos concitoyens, que signifie alors « nous représenter » ? Et qui est le plus à même de remplir cette tâche ?

L'un des arguments favoris des candidats déjà déclarés est de dire : « Je suis un expatrié comme vous, je connais vos problèmes, j'y répondrai !».

C'est l'argument de l'expérience, du vécu qui octroierait naturellement une qualification et une compétence. Cet argument n'est pas spécifique à la politique, il se retrouve dans tous les domaines d'activité de la vie : la connaissance empirique prévaudrait sur toutes les autres.

Cet argument, basé sur une forme de misologie, est par nature contestable et a été contesté par nombre de philosophes.

Mais nul besoin d'en référer à de grands penseurs pour voir la fatuité d'un tel argument dans le cas qui nous concerne de la 11ème circonscription, tellement riches et multiples sont les différentes expériences d'expatriation que nous vivons comme Français de l'étranger installés en Asie, Océanie et CEI.

Quelle « expérience de l'expatriation» peut en effet permettre à la fois de comprendre un expatrié représentant un grand groupe français à Shanghaï et un professeur de FLE en contrat local dans le Kansai ? Qui peut avoir le vécu d'un entrepreneur en Australie et celui d'un retraité installé à Hanoï ?

Et dans une même catégorie socio-professionnelle l'expatriation se vit-elle de la même façon ? L'entrepreneur en Nouvelle-Zélande ne rencontre bien évidemment pas les mêmes contraintes que celui installé au Timor-oriental...

On le voit bien l'expérience de l'expatriation ne peut servir d'argument pour nous représenter.

Je penserais même qu'elle peut être problématique si un député n'a comme paradigme que sa propre expérience. Un député expatrié risquerait de ne concevoir l'expatriation que sous l'angle exclusif de sa propre expérience, forcément différente, de milliers de celle d'entre nous et donc « mal » nous représenter.

Ses sensibiltiés seront naturellement bien différentes notamment en matière de scolarité, de sécurité mais aussi de politique étrangère ou énergétique. Le choix entre une scolarité locale ou dans le système français ne peut être envisagé sous le même angle à Sydney et à Dacca. On ne parle pas du nucléaire de la même façon à Tokyo qu'à Dehli, les inquiétudes que suscitent les crises iraniennes ou coréennes ne sont pas ressenties par tous nos compatriotes de CEI, d'Asie et d'Océanie de manière identique.

Et pourtant ce sont toutes ces vies, ses expériences si différentes que notre député devra prendre en compte.

Il est donc indispensable que celui-ci ait un regard égal sur toutes nos communautés disséminés sur les 3 continents de la 11ème circonscription, une capacité à comprendre la complexité et la multiplicité de nos problématiques, sans préjugés ni exclusives.

Si l'on prend en compte ces arguments, et si l'on rajoute l'isolement que connaitra ce député à l'Assemblée nationale par notamment sa faible présence s'il visite sa circonscription, il me semble qu' il faille pour  nous représenter, non pas « un des nôtres », mais une personnalité compétente et forte, dont les idées et les valeurs comme le nom et la notoriété  sont déjà clairement bien établis et reconnus dans toutes nos communautés sur les 3 continents.

Alexandre Joly.

 

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