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07 mai 2008

Nous et la Chine

Il serait plus que temps de se poser des questions concernant nos relations et celles des pays démocratiques avec la Chine.
La question tibétaine est revenue sur le devant de l'actualité, les jeux olympiques de Pékin auront lieu dans moins de cent jours, la politique étrangère de la Chine que ce soit en Afrique (Soudan, Zimbabwee, etc) ou en Asie (Birmanie, Iran, Corée du Nord, etc) pose question. A cela s'ajoute le poids économique toujours plus grand de ce pays et le fait que la Chine a été et est toujours un centre culturel et historique d'importance. Ce pays a beaucoup influencé l'histoire de l'humanité ce qu'il va sans doute continuer à faire.
 
 
La question des jeux olympiques.

Beaucoup de gens ne souhaitent pas un véritable boycott des jeux olympiques en arguant d'une invraisemblable séparation entre sport et politique. Plusieurs points s'opposent à une telle attitude.
Tout d'abord, le Comité International Olympique s'enorgueillit de promouvoir les valeurs de l'olympisme moderne (fraternité des hommes quelque soit leur origine, respect de la condition humaine, etc) et mit même clairement en avant de la défense des droits de l'homme lors du choix de Pékin en 2002. Ce sont des valeurs politiques et non des valeurs propres au sport. De plus, et paradoxalement, le comité olympique arrive trop souvent et trop facilement à faire abstraction de la situation politique de certains pays choisis pour organiser les jeux. Les exemples sont nombreux et les plus marquants sont Berlin en 1936, Mexico en 1968, Moscou en 1980 et maintenant Pékin. Tout le monde sait bien que les pays organisateurs essaient toujours d'utiliser l'organisation des jeux comme une vitrine de leur modèle social et économique. C'est d'autant plus vrai et important pour les pays peu ou pas du tout démocratiques. Les enjeux financiers sont énormes et les multinationales qui sponsorisent les jeux olympiques feront tout ce qu'elles peuvent pour éviter un boycott des jeux par les nations mais aussi par les sportifs sur lesquels elles ont une grande emprise. Il y a donc une alliance objective entre les pays organisateurs et les sponsors.
Reste que le problème de l'organisation de cet évènement en Chine n'est qu'un problème ponctuel alors que d'autres questions ayant des répercussions plus profondes se posent à nous.
 

La Chine comme partenaire économique

Beaucoup d'entreprises européennes, américaines, japonaises, etc ont choisi de délocaliser une partie de leurs chaînes de montage et d'assemblage en Chine. Les raisons sont connues : faiblesse des coûts de production (bas salaires, loyers peu chers, etc) et présence sur un marché à fort potentiel. Tout cela a été encouragé par la politique économique du gouvernement chinois qui a tout fait pour attirer les investisseurs étrangers. Dans un contexte de libre-échange, il est normal que les entreprises cherchent à être présente partout tout en cherchant à rentabiliser au maximum leurs investissements. Cela a bien évidemment profité à d'autres pays que la Chine. Mais ce qui est frappant dans le cas chinois est la frénésie de ces investissements et le manque de vision à moyen et long terme de ces entreprises. Certes, ces dernières en profitent beaucoup maintenant mais ne se sont-elles pas tirées une balle dans le pied ? Le système économique fait que la Chine a acquis d'énormes capacités financières qui nous rendent de plus en plus dépendant d'elle. Les Chinois sont également en train de rattraper leur retard technologique à grands pas grâce aux transferts volontaires et involontaires de technologies. De plus, la concentration sans précédent de certaines productions dans ce pays est anormale et économiquement dangereuse ; c'est par exemple le cas des jouets. A cela s'ajoute que le niveau de qualité des composants et de la fabrication est souvent moyen voire médiocre. Certains experts et certains responsables politiques et économiques affirment que les pays économiquement développés conserveront une bonne avance technologique et une capacité d'innovation supérieure à des pays tels que la Chine ou l'inde. Ce raisonnement ne tient pas. Un pays peut rattraper son retard beaucoup plus rapidement que dans le passé. La Corée du sud et Taïwan commencent déjà à égaler les capacités d'innovations technologiques du Japon dans certains secteurs électroniques ! Pourquoi la Chine n'en serait-elle pas capable ?
Il faudrait éviter de mettre tous ses œufs dans le même panier et avoir une vision à long terme des effets d'une délocalisation importante de nos capacités de production. En favorisant trop la Chine ou un autre pays, les pays développés rétrograderont.
 
 
La Chine dans le concert des nations

En tant que puissance nucléaire, économique et démographique, la Chine est bien évidemment une pièce importante et incontournable de l'échiquier mondial. Les Etats-Unis semblent s'en être rendus compte au contraire des Européens. De par ses besoins en terme de matières premières (pétrole, métaux, gaz, etc), la Chine cherche à s'assurer des routes d'approvionnement sûres. Cela explique en partie la présence de plus en plus importante de ce pays en Afrique et et en Asie mais aussi ses tentatives, encore timides, en direction de l'amérique du sud. Le problème se posera également bientôt avec l'Inde et le Brésil.
Cependant, l'économie n'est pas la seule explication de cette "mondialisation de la Chine". Il y aussi des raisons politiques. L'économie chinoise s'est en partie libéralisée mais le système politique n'a pas suivi le même chemin. Ce qui se passe au Tibet mais aussi avec les Ouïgours montre bien que le régime chinois utilise le nationalisme comme un instrument de pouvoir. Il suffit d'entendre et de lire les slogans des manifestants déclarant que le Tibet fait et fera toujours partie de la Chine. Penser que le développement économique va améliorer les choses, c'est faire preuve de beaucoup d'optimisme voire de naïveté. A la différence de l'Union Soviétique, la Chine commence à avoir une puissance économique telle que le pouvoir ne sera sans doute pas immédiatement menacé par son opinion publique puisqu'il pourra satisfaire les besoins basiques de sa population. Ce pays développe et modernise également son armée afin de pouvoir contrer l'influence américaine jusque sur les océans (cf. la construction d'une immense base navale de Sanya à Haïnan 1). Cela doit lui permettre de protéger ses routes commerciales et de faire pression sur ses voisins avec lesquels il y a nombre de contentieux frontaliers agravés par la présence de matières premières et de sources d'énergie (2).
A tout cela, il faut ajouter un aspect culturel : la volonté de la Chine de retrouver son statut de première puissance du monde. Certes, ce n'est pas une particularité chinoise. Les Américains, les Russes et même les Français (sur un plan plus moral) veulent être les phares de l'humanité. Le problème est le contenu idéologique qui soutient une telle volonté. Le système politique chinois étant ce qu'il est, on peut plus que douter de ses bienfaits pour le monde.

Il est donc important de d'entretenir des relations avec la République populaire de Chine mais il faut aussi savoir s'opposer à elle quand cela est nécessaire. On le fait bien avec d'autres grandes puissances comme les Etats-Unis. Ce que messieurs Raffarin et Poncelet ont récemment fait ressemble plus à une pantalonnade qu'à une véritable mission diplomatique. Les pays occidentaux doivent comprendre la spécificité de la Chine et traiter avec elle d'égal à égal sans renoncer à leurs principes. Il en va de même pour nos relations avec la Russie. Le relativisme culturel trop poussé encourage à tout accepter même l'inacceptable. Quant à nos décideurs économiques, ils devraient éviter de ne s'intéresser qu'au court terme.
 
 
Hervé Tisserand 

03 juin 2007

Où en est l'économie japonaise ?

Après une longue période de stagnation, l'économie japonaise a redémarré sans pour autant atteindre des sommets. La croissance a cependant été de 2,2% pour l'année 2006. Cette croissance repose essentiellement sur trois facteurs :
  • La consommation des ménages. Le demande intérieure se maintient et progresse même un peu (+ 0,9% pour le premier trimestre 2007 par rapport au trimestre précédent).

  • les investissements des entreprises mais ces derniers ont reculé de 0,9% au premier trimestre 2007.

  • es exportations qui se portent bien : + 3,3% au premier trimestre 2007.

A cela, il faut ajouter la baisse du chômage dont le taux s'établit à 4%, chiffre le plus bas depuis 5 ans (5,5% en 2002)

Voilà pour les chiffres généraux de l'économie nipponne. On peut donc considérer que l'activité économique se porte mieux dans l'archipel. En fait, ces chiffres cachent des données beaucoup moins reluisantes.

Si la consommation reste forte, c'est surtout dû au fait que les Japonais ont choisi de consommer des produits bon marchés au détriment des produits haut de gamme. Ainsi, les ventes des grands magasins (デパート) tels que Sogo, Daimaru, Isetan, etc diminuent d'années en années d'où la multiplication des périodes de soldes de ces grandes enseignes. Le nombre de magasins bons marchés a fortement augmenté et s'il faut donner un exemple, je choisirai celui de Uniqlo, une chaîne de magasins de vêtements peu onéreux et présente partout au Japon.

Concernant les exportations, il n'y a pas de doute que ce secteur reste un point fort de l'économie japonaise mais les revenus générés par les exportations sont en grande partie avalés par les dépenses énergétiques. Le Japon est très dépendant de l'extérieur et doit importer énormément de matières premières et de sources d'énergie. Le volume de ces importations, la faiblesse du yen par rapport au dollar et le cours du pétrole relativement élevé jouent contre l'économie nipponne.

Quand une économie connaît des difficultés, l'emploi est souvent le domaine qui est le premier à en souffrir. Le chômage avait beaucoup augmenté au Japon durant les années de crise. Certes, il n'était en rien comparable a celui de la France mais cette augmentation du nombre de sans emplois étaient toutefois vécue comme un grave échec. Cependant, cette baisse du chômage ne signifie pas la fin de la précarité. En effet, les emplois créés sont souvent des emplois partiels. La part des actifs exerçant un emploi à temps partiel est passée de 25% en 1995 à 33% en 2005 ! Les jeunes ne peuvent plus obtenir un emploi à vie comme avant et, pour beaucoup, ils n'en veulent plus. On a donc vu apparaître une nouvelle catégorie de travailleurs : les freeter (フリター) aussi appelés NEETs (Not in Employment, Education or Training ). Ce sont des jeunes qui préfèrent alterner ou cumuler les emplois à temps partiel. Ici, la sécurité de l'emploi signifie également qu'on ne peut presque rien refuser à son employeur d'où les problèmes d'heures supplémentaires souvent non payées ou l'absence de royalties ou de primes pour les inventeurs (cf. le cas de l'inventeur de la première console de jeu Nintendo). Cela explique en partie que beaucoup de jeunes ne souhaitent pas travailler pour un grand groupe japonais. Ils font certes une croix sur des revenus plus élevés mais ils compensent cela en restant chez leurs parents plus longtemps.

On constate donc que l'économie japonaise se portent légèrement mieux mais que cela signifie en rien qu'elle a retrouvé son dynamisme passé. Le Japon reste un pays très riche mais il va devoir faire face à des enjeux qui risquent de remettre en cause sa puissance économique : dénatalité entraînant un vieillissement important de la population, règlement de sa dette publique résultant des gigantesques plans gouvernementaux de relance des années 90, concurrence accrue et à tous les niveaux des pays émergents (Chine, Inde, Asie du sud-est) en plus de pays déjà redoutables sur le plan économiques : la Corée du sud et Taïwan. D'une certaine manière, la situation du Japon a beaucoup de points communs avec celle de l'Europe.

Hervé Tisserand