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15 mars 2007

Du ministère de l'immigration et de l'identité nationale

En perte de vitesse dans les sondages, et parce que dépassé dans sa stratégie d'occupation du terrain et des médias par F. Bayrou, N. Sarkozy a employé sa tactique préférée du pyromane-victime pour ramener les projecteurs vers lui. Ainsi, jeudi 08 mars, lors de l'émission d'A. Chabot, A vous de juger, il a annoncé la création s'il était élu d'un Ministère de l'Immigration et de l'Identité Nationale.

Nous ne nous attarderons pas sur les postures morales qu'adoptèrent l'ensemble de la classe politique française dans son unanimité moins une voix. Car non seulement aucun sujet n'est tabou, pas plus celui de l'identité nationale qu'un autre, mais surtout les postures des uns et des autres n'ont fait que servir le dessein de Sarkozy de se présenter comme la victime d'une intelligentsia parisienne gauchisante et moralisatrice. Ce piège dans lequel les uns et les autres sont tombés n'a eu pour effet que de le renforcer dans son électorat populaire.

En revanche, nous serions fortement avisé de nous interroger sur ce que veut faire N. Sarkozy avec ce ministère et d'en demander réponse à ses électeurs.

Car première question, quelles en seront ses attributions ? C'est bien beau de vouloir créer des ministères à droite et à gauche, mais pourquoi faire ? Peindre des fresques murales dans les quartiers à la gloire de héros nationaux dont on se disputera de savoir s'ils ont servi ou desservi la France; développer la production de bustes de Marianne pour que tous les Français en aient un chez eux; rappeler qu'il faut traverser dans les clous aux carrefours car violer la loi s'est s'en prendre à la nation dans son ensemble?
Comment gère-t-on l'identité nationale ? Comment un ministère gére-t-il une valeur ? Si N. Sarkozy veut créer des ministères pour chaque concept relatif à la nation, on peut ainsi lui soumettre des idées de ministère : Celui des 25 ans de Déclin; ou à l'inverse de la Grandeur Nationale; celui de la France Eternelle; ou encore des Origines Chrétiennes de la France... Comme si la création d'un ministère resolvait à lui seul une question philosophique.
Je ne peux m'empêcher de faire le rapprochement entre la proposition de N. Sarkozy et celle au Japon du gouvernement Abe d'introduire plus « d'instruction patriotique » dans les programmes scolaires. La recherche pour ces hommes du bon « patriote » ou de la bonne « identité » renvoie plus à des phobies et des frustrations qui leurs sont propres qu'a une quelconque réalité sociale.

Deuxième question, combien va coûter au contribuable ce nouvau ministère inutile? Il est vrai que dans la spirale dépensiaire de son programme ( estimé à quelques 50 milliards, plus la promesse de rendre « 68 milliards aux Français »), quelques millions d'euro supplémentaires pris aux contribuables pour nommer un copain ministre, ce ne sont que des broutilles. Mais il n'empêche qu'il serait temps que les Français ouvrent les yeux et cessent de croire en ce catalogue de promesses toutes plus coûteuses, inutiles et grand-guignolesques que nous desservent le couple Royal-Sarkozy. Et pire que des promesses mensongères serait leur mise en oeuvre qui ruinerait ainsi définitivement le pays.

Troisième question, est-ce que N. Sarkozy veut naturaliser tous les étrangers qui viennent en France ? Question d'apparence saugrenue mais qu'on est en droit de se poser tellement il mélange les genres. Ainsi lors de son meeting du 13 mars à Besançon, il a dit qu'il : « continuerait à parler de l’immigration en posant le problème de l’identité nationale parce que ce que nous avons de plus précieux à offrir à tous ceux qui veulent vivre en France c’est la fierté d’être Français ».
Si on comprend bien notre ministre, l'étranger qui vient travailler quelques années en France doit vouloir devenir fier d'être français. Même s'il rentre chez lui après ? Il aura l'air fin le fier Français en revenant dans son village natal du Mali ou d'ailleurs... Si nous écoutions notre cher ministre de l'intérieur, par un exemple miroir, nous, Français qui vivons au Japon, devrions avoir pour objectif de devenir Japonais. Et des Japonais fiers de surcroit !
M. Sarkozy assimile ainsi toute immigration à un transfert permanent de population. C'est en cela que ses propos rejoignent ceux du F.N. En assimilant l'immigré à un colonisateur qui vient s'installer ad vitam eternam sur le territoire et qui n'aurait plus aucune intention de le quitter il entretient l'amalgame entre immigration, implantation, naturalisation et intégration.
Autre exemple d'ignorance : son projet de conditionner le regroupement familial à la maîtrise du français. C'est à se demander si N. Sarkozy a déjà quitté la France. Sait-il que ce qui, entre autres choses, caractérise les pays étrangers c'est le fait que leurs habitants y parlent une langue .... étrangère. Notre ministre candidat croit-il réellement que le réseau d'école française est à ce point développé à travers le monde que le plus pauvre des paysans togolais ou laotien soit en mesure de s'y rendre apprendre notre langue ? On frise le ridicule.
Rendre impossible, comme cela semble être l'objectif, le regroupement familial par l'application de lois kafkaïennes aura deux conséquences majeures : Tout d'abord, nous mettre hors la loi vis à vis des conventions internationales sur les droits des travailleurs migrants; Et surtout augmenter considérablement le nombre de migrants clandestins ...

De quoi occuper la police et les compagnies de charter pour les prochaines décennies.

Cette ignorance des hommes en général, de l'autre en particulier est à mon sens chez N. Sarkozy la meilleure explication de cette France étriquée, peureuse et repliée sur elle même dont il fait la promotion sans s'en rendre compte. Le discours droitier de N. Sarkozy n'est ni idéologique ni théorisé, mais il est le fruit de son inculture et de sa volonté de séduire le plus grand nombre coûte que coûte, sans limite.

Elle est surtout à l'origine de propositions aussi contradictoires, inutiles et dispendieuses que dangereuses.

Alexandre Joly.

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