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15 septembre 2008

Sarkozy et la laïcité : le malentendu

Ignorant de l’histoire politique et religieuse de la France ? Enfonceur de portes ouvertes ? Ou machiavélique stratège réactionnaire? Difficile de qualifier l’obstination présidentielle à continuer de parler de « laïcité positive » comme il l’a fait lors de son discours d’accueil du Pape, et d’en saisir les fondements et les objectifs politiques. A défaut d’explications claires et de volonté de l’intéressé d’en débattre (c'est-à-dire avoir des contradicteurs), essayons néanmoins de comprendre.

Depuis plusieurs années déjà Nicolas Sarkozy s’efforce de convaincre le pays, avec d’autres à l’UMP comme Eric Raoult, que la laïcité, telle qu’inscrite dans les lois et appliquée en France, ne serait pas ou plus adaptée à la réalité de notre temps. Lui reprochant une forme d’incapacité à assimiler les nouvelles religions émergeantes sur le sol de la République (principalement l’Islam) il vitupère contre le musellement et l’oppression dont serait victime la principale religion du pays (le Catholicisme). En 2004 dans son livre La République, les religions, l'espérance il jugeait la laïcité « épuisée» flirtant avec « le fanatisme ».
C’est de ce constat qu’il tirait et continue à tirer argument pour « appelle[r] une nouvelle fois à une laïcité positive » (discours du 12 Septembre 2008).

Le terme de « laïcité positive » est devenu le leitmotiv présidentiel et le symbole de la polémique qu’entraînent les prises de position du Président. En juxtaposant un qualificatif comme « positif » il entend modifier le sens et la valeur première du mot qu’il qualifie. A moins de vouloir sciemment produire un pléonasme, ajouter « positif » au mot « laïcité » implique soit que cela ne va pas de soit, soit que c’est même l’inverse, la laïcité n’est ni un bien ni une avancée sociale. On trouve l’exemple de cette réhabilitation d’une politique négative par son positivisme sémantique aux Etats-Unis dans la politique de « discrimination positive » qui vise à favoriser ceux (les Afro-américains) qui furent victimes des politiques ségrégationnistes, instrument de discrimination (et ce n’est pas un hasard si Nicolas Sarkozy a aussi repris cette idée à son compte).

Comme la discrimination a pu trouver sa rédemption dans son positivisme, Nicolas Sarkozy sous-entend que la laïcité peut et doit en faire de même. Comment ? Réponse toujours hier devant Benoît XVI : en inventant une « laïcité positive, (…) laïcité ouverte, (…) une invitation au dialogue, une invitation à la tolérance et une invitation au respect ».
Propos magnifiquement consensuels, humanistes et démocrates qui sonnent aussi doux qu’une certaine loi du 9 décembre 1905, signée par le Président de l’époque Emile Loubet et pierre angulaire de… la laïcité à la française. Car qu’est-ce que l’article 1 de la loi quand est décrété que « la République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes », sinon un appel à la tolérance vis-à-vis des croyants et des incroyants ? Que sont les articles 31 et 32 qui sanctionnent les « mangeurs de curés » et autres perturbateurs de messes, sinon des appels au respect des croyances et des croyants ?

A entendre ainsi les propos présidentiels, on s’interroge sur sa connaissance des textes législatifs et l’histoire de leur vote, ainsi que sur l’originale interprétation qu’il en tire ou sa vision démoniaque et archaïque de la laïcité. Alors petit rappel : Non la laïcité, comme appliquée dans la République n’est pas synonyme d’athéisme d’état, non la laïcité comme loi votée en 1905 ne vise et n’a jamais visé à l’annihilation de toute religiosité en France, la laïcité étant au contraire la recherche d’harmonie entre l’état, la religion majoritaire, celles minoritaires, les athées et incroyants. Laisser entendre comme le Président que la loi de 1905 cherche à museler toute religiosité c’est ignoré le soucis de la majorité des parlementaires de l‘époque de parvenir à une loi d’apaisement et de respect. Qu’on se souvienne des propos du rapporteur de la loi, Aristide Brillant, mettant en garde les anticléricaux à la Chambre contre « toute loi qui soit braquée sur l’Ėglise comme un revolver ». Ce soucis de la modération avait été ainsi commenté par l’écrivain Charles Péguy : la loi « en un mot, elle n’avait point été combiste*, mais beaucoup plus républicaine. »

« On tremble devant tant d'inculture historique ! » écrivait Bernard Poignant dans une tribune publiée par Le Monde du 09 Septembre 2008 suite à des propos du président sur la Russie. Il semblerait que son ignorance s’étende aux champs du droit et de l’histoire politico-religieuse de la France. Inquétant.

Mais l’ignorance n’empêche pas l’action politique ou la volonté de donner l’illusion de l’action politique. En créant une polémique sur un sujet sensible, le président donne l’impression de vouloir faire changer les choses, renforçant aux yeux des plus crédules sa stature « réformatrice ». Même si, comme on l’a vu dans les exemples précédents sur la définition de la laïcité, il ne fait que reprendre ce qui est déjà en vigueur depuis plus d’un siècle. Le Président enfonce des portes ouvertes pour mieux se targuer de les avoir déverrouillées, comme avec cette perle oferrte au Pape: « La quête de spiritualité n'est pas un danger pour la démocratie, et n'est pas un danger pour la laïcité. ». Evidemment puisque l’essence même de la laïcité est de défendre le droit à la quête de spiritualité, quelle qu’elle soit ! On imagine mal un principe être mis à mal par la propre définition de sa raison d’être.

Malheureusement, consciemment ou inconsciemment, en redéfinissant la laïcité comme une caricaturale domination de l’athéisme, ce qu’elle n’est absolument pas et se défend d’être, Nicolas Sarkozy attaque un des piliers de notre République, une des valeurs qui fondent, forgent et unifient notre nation. Au risque de réveiller des vieux démons comme le montrent les réactions du porte parole de l’UMP, Frédéric Lefebvre, qui a traité les gens qui s’offusquaient des propos présidentiels « de vieux laïcards » ou de François Hollande qui n’hésita pas à qualifier les dits propos de « vieille rengaine de la droite la plus cléricale ». La même qui était anti-parlementariste et anti-républicaine…

Alors Nicolas Sarkozy machiavélique stratège d’une droite réactionnaire, anti-républicaine sur le retour ? Cela peut paraître excessif. Néanmoins, on peut s’en inquiéter tant est récurrent le propos et la stratégie pour y parvenir semble claire : en pointant des menaces (plus fantasmées que réelles) qui pèseraient sur la laïcité, en sapant sa portée, il entend préparer l’opinion publique à une modification de ses règles d’application aux travers de réformes jugés, unilatéralement, indispensables. Celles-ci présentées sous un emballage de « modernité et d’ouverture » marqueront bien évidemment un recul de la laïcité (on pense notamment à un développement du soutien financier aux écoles religieuses, de l‘utilisation des institutions religieuses comme suppléant social ou médiateur de l’état dans certains quartiers…).
Les exemples de réussite de ce type de stratégie mystificatrice ne sont malheureusement plus à démontrer. Rappelons ainsi la réduction substantielle et régulièrement dénoncée par nombres d’associations, des libertés individuelles depuis 7 ans aux Etats-Unis après l’entrée en vigueur du « Patriot Act » : ensemble de lois pourtant votées au nom de la défense des libertés mais qui s’avouèrent ouvertement liberticides.

Nicolas Sarkozy ignorant et inculte ? Grand communiquant dans le vent ? Ou grand ordonnateur d’une réaction anti-laïque ? Quelque soit la réponse, une grande vigilance s’impose. Car si aujourd’hui il y a un problème de laïcité en France, il provient plus de la multiplication des prises de position présidentielles dans le domaine du religieux et des croyances (et dans beaucoup d’autres d’ailleurs) ou dans son obstination à vouloir exprimer, et dicter une (sa ?) pensée aux Français que de l’implication des religions dans la gestion de l’état. Il est grand temps que notre César rende à Dieu ce qui est à Dieu, et retourne à la mission pour laquelle il a été élu.

Alexandre Joly.

* du nom d’Ēmile Combes, président du Conseil de 1902 à 1905, anticlérical convaincu bien que spiritualiste, qualifié à l'époque de « mangeur de curés » .

27 juillet 2008

Obama en Europe : le sacre de Merkel

Rarement, l’emploi du temps d’un candidat à la Présidentielle américaine en visite en Europe n’a suscité autant de commentaires que celui entrepris par Barack Obama ces deux derniers jours.

Et dire qu’à Paris et Londres ceux-ci furent amers est un doux euphémisme. Car en diplomatie, les symboles, aussi infimes qu’ils puissent paraître, sont souvent lourds de sous-entendus.

Ainsi, en passant une journée complète en Allemagne, en y tenant un meeting devant 200 000 Berlinois, en rencontrant plusieurs membres du gouvernement, le candidat démocrate a conféré à l’Allemagne et à sa Chancelière un poids politique que par voie de conséquence il a dénié aux autres.

Or cette importance accordée à l’Allemagne d’A. Merkel au détriment de l’Angleterre de G. Brown et de la France de N. Sarkozy, n’est autre que la reconnaissancee de sa prédominance sur l’Europe.

Si l’économie allemande surclasse depuis quelques décennies ses concurrentes européennes, son poids politique sur la scène internationale demeurait en retrait. Exclue de la permanence du Conseil de Sécurité des Nations Unies au sortir de la Seconde Guerre mondiale, dénuée de zone d’influence privilégiée, puissance militaire émasculée par son impossibilité (aujourd’hui levée) de déployer des troupes sur des théâtres extérieurs et surtout sa non nucléarisation, elle devait laisser à la France et à l’Angleterre les rôles principaux de puissance diplomatique.

Or malgré la pérennisation de ces handicaps, malgré le fait que la France préside depuis le premier juillet l’Union Européenne, malgré un pro américanisme affirmé et la volonté affichée par N. Sarkozy de vouloir rejoindre le commandement unifié de l’OTAN, et bien que le président dise être son «copain » (un de plus ! mais quand arrêtera-t-il donc ces déclarations infantiles !), c’est à l’Allemagne que Barack Obama a accordé toute son attention, et non à Londres ou Paris.

On pourra toujours arguer que ce genre de remarques ne sont que des crises de franchouillardises mal placées, qu’il n’y a pas réellement de symbole derrière tout cela, ou au contraire que c’est un plan com’ pour rappeler à l’Amérique les grandes heures de Kennedy ou Reagan, quand ce n’est pas lié à l’image de la France aux Etats-Unis….

Il n’empêche. La victoire médiatique d’Angela Merkel ne vient que confirmer sa prédominance actuelle sur l’Europe et l’effacement de la France et de l’Angleterre. Car ce qu’aujourd’hui la chancelière veut, ou ne veut pas, elle l’obtient .

Les déboires connus par l’Union Pour la Méditerranée en furent un exemple frappant : Nicolas Sarkozy et Henri Guaino, le principal instigateur du projet, souhaitaient la création d’une structure indépendante de celle de l’Europe, dans laquelle, les seuls pays méditerranéens auraient un droit égal au chapitre au travers de relations diplomatiques renouvelées : belle idée qui avait le triple avantage de revigorer les échanges inter méditerranéens, présenter une alternative à un éventuel choc Nord-Sud, et renforcer le rôle de la France dans l’espace méditerranéen.

Mais une telle structure qui excluait les pays européens non méditerranéennes était jugée par l’Allemagne comme une menace pour sa propre diplomatie. Le gouvernement d’ Angela Merkel déploya donc une politique étrangère concurrente et double, l’une à destination de la France et une autre vis-à-vis des pays méditerranéens à fin de vider le projet français de son contenu. Et cela avec la réussite qu’on connaît : intégration de l’U.P.M dans le processus mortifère euro-méditerranéen de Barcelone, incorporation de tous les pays européens, maintien d’un type d’échange / assistance « à l’ancienne » Nord Sud qui provoqua la colère de Khadafi… bref une victoire diplomatique allemande sur toute la ligne.

La puissance d’Angela Merkel a des répercussions pragmatiques. Celle-ci peut en effet se permettre de traiter d’égal à égal avec les dirigeants les plus puissants du globe et leur dire leur quatre vérités . Ainsi Madame Merkel n’a pas eu à s’humilier en saluant l’élection truquée de Vladimir Poutine et elle a pu annoncer qu’elle n’irait pas aux cérémonies d’ouverture des JO sans que cela n’entraîne de manifestations anti-allemandes dans les rues de Pékin. L’Allemagne sait aujourd’hui imposer le respect, la France non.

S’il serait stupide de faire remonter le déclin diplomatique de la France à mai 2007 et malhonnête d’expliquer la renaissance de l’Allemagne par le seul effet de la politique de Nicolas Sarkozy, il est incontestable que ses alignements non négociés (Etats-Unis), ses revirements (Syrie), précipitations (Constitution européenne), ultimatums bidons (Chine, Iran) autocritiques quant aux grandes déclarations regardant le respect des droits de l’homme (Tunisie, Libye) n’ont pu qu’aggraver et amplifier l’affaiblissement de la puissance diplomatique française.

Comme l’ont bien analysé les conseillers diplomatiques de Barack Obama.

Alexandre Joly.

17 juillet 2008

Francois Bayrou accuse les plus hautes autorités de protéger B. Tapie !

Invité de RTL le 17 juillet 2008, François Bayrou a accusé "les plus hautes autorités du pays" d'avoir protégé Bernard Tapie. Celles-ci auraient accordé, selon François Bayrou, des "protections" à B. Tapie dans le règlement du litige qui l'opposait au Crédit Lyonnais. Dans cet entretien, Il qualifie également le tribunal arbitral de "blague".

 La vidéo de l'entretien ci-dessous :

 

Pour de plus complètes informations sur l'affaire, nous vous conseillons les très bons articles de Thierry Philippon disponibles sur le site du NouvelObs.fr.

A noter, en complément, que B. Tapie a qualifié vendredi 18 Juillet à l'AFP l'attitude de F. Bayrou de "ridicule et irresponsable". Quant à une éventuelle intervention de N. Sarkozy, il a affirmé que le Président n'avait "rien à voir, ni de près ni de loin" avec cette décision et qu'il imaginait mal celui-ci "capable d'appeler Jean-Denis Bredin, Pierre Mazeaud et Pierre Estoup pour leur faire rendre un jugement en ma faveur". Réponse surprenante quand on sait que le "tribunal arbitral" avec ces trois juges est une création gouvernementale datant d' octobre 2007 et qui fait suite au jugement défavorable à monsieur Tapie pris par la Cour de Cassation en 2006. C'est un exemple flagrant de mise au pas de la Justice par le Politique.

On a connu B. Tapie plus convaincant dans ses plaidoiries ! 

Hervé Tisserand, Alexandre Joly.

01 avril 2008

Mensonge, mépris et autocratie

Ce mardi 12 mars va se jouer à l'Assemblée Nationale une pièce tragi-comique comme seule la cinquième République peut en scénariser : François Fillon, chef du gouvernement, viendra exposer aux parlementaires les modalités de l'envoi de nouvelles troupes françaises en Afghanistan.
La guerre en Afghanistan posant le contexte tragique, la lecture du premier ministre celle du comique.

« Qu'y a-t-il donc de si hilarant à ce qu'un dirigeant s'adresse aux représentants du peuple ? » me demanderez-vous ? Rien à priori, si ce n'est dans ce cas un magnifique triple effet comique de situation. Autrement dit une forme d'humour basée sur les paradoxes, décalages, volontaires ou non, entre la situation présentée et celle que l'on était logiquement en droit d'attendre.

Tout d'abord le lieu : l'Assemblée Nationale est le lieu où se réunissent les députés pour débattre et voter des lois. C'est sa raison d'être dans une démocratie. Or ici, nul débat et surtout nul vote n'est proposé en fin de séance sur ce qui pourtant ressemble fort à une décision politique majeure. Les députés vont se retrouver dans la posture de simples auditeurs et spectateurs d'un fait princier, d'une décision de gouvernance qui leur aura complètement échappée. Ce n'est pas la première fois dans la cinquième République, certes, c'est même constitutionnel, mais le fait est que la France est la seule « démocratie » où le Parlement n'a pas son mot à dire sur une guerre que mène le pays.
Comme l'a dit H. Emmanuelli lors de questions au gouvernement ce 26 mars : « La France est la seule démocratie occidentale où une guerre peut perdurer sans que le Parlement ne l'autorise  ou ne soit informer».

Il y a 2 000 ans, sous le Principat d'Auguste, qui n'était pourtant pas un modèle démocratique, le Sénat romain votait et entérinait encore les déclarations de guerre décidées par ce dernier. En France, en 2008, ce n'est même plus le cas.

Deuxième point comique : l'acteur principal. Mais qui est-ce, Nicolas Sarkozy ou François Fillon ? On sait que cette décision politique est une volonté présidentielle, un geste qui se veut fort pour marquer la détermination de Nicolas Sarkozy à rapprocher la France de l'OTAN et des Etats-Unis. Mais qui défend ce choix ? Le premier ministre. Situation surprenante et burlesque d'un Prince incapable de faire un plaidoyer de sa politique et qui envoie en représentation son premier ministre, lui même simple exécutant. Certes, dans les institutions le Président de la République n'a pas le droit de se présenter devant le Parlement (situation qu'avait promis de modifier Nicolas Sarkozy lors de sa campagne électorale, cette autre grand spectacle comique, et dont on attend la réforme) mais quel affront et mépris portés à la face des représentants du peuple que de les obliger à suivre la lecture par celui qui n'en est pas l'instigateur d'une décision à laquelle ils ne participeront pas !

Enfin le fond : l'envoi de troupes supplémentaires sur un théâtre de guerre. Combien de scènes de cinéma, de théâtre sont basées sur l'opposition entre le propos et l'action ? Entre ce qu'un personnage dit, promet de faire ou avoir fait et ce qu'il fait ou a réellement fait ? En un mot sur le mensonge ? Autant qu'il existe de films et de pièces comiques. Alors pourquoi ne pas rire aussi de cette déclaration de Nicolas Sarkozy durant la campagne électorale de 2007 qui prend toute sa saveur aujourd'hui ?
Dans une interview sur France 2, face à Arlette Chabot qui le questionnait sur le premier retrait des troupes spéciales opéré alors par Jacques Chirac il expliqua : « c'est une politique que je poursuivrai » la justifiant parce que « la présence des troupes françaises à cet endroit du monde ne me semble pas décisive ». Promesse de retrait mais décision d'envoyer de troupes. C'était la boutade finale. Eclats de rire. Rideau !

La Cinquième République a toujours porté en elle les risques d'une dérive autocratique. Le mensonge comme le mépris à l'encontre du peuple et de ses représentants ne sont que les conséquences naturelles et humaines de cette dérive. Et la parodie de démocratie qui va se jouer à l'Assemblée Nationale cette après-midi n'en est qu'une énième illustration. Malheureusement nous ne sommes pas dans un film et des soldats, des civils paieront de leur vie cette décision prise sans l'accord des citoyens de ce pays. 
Il est tant que les Français prennent conscience que leur rejet progressif de la politique vient de la structure même d' institutions qui ne favorisent pas l'émergence d'une gouvernance respectueuse, morale, démocratique et où les mots justice, égalité et liberté auraient le même sens que celui qu'ils entendent.

Alexandre Joly.

Extrait de l'interview : http://www.dailymotion.com/video/x4u47q_nicolas-sarkozy-e...

 

21 mars 2008

Affaire du SMS : un bien malheureux épilogue

           On savait depuis bien longtemps Nicolas Sarkozy maître dans l’art du contre-pied. Le point final surprise (mais le sera-ce vraiment ?) annoncé par Carla Bruni-Sarkozy dans une tribune au journal Le Monde, de l’affaire de l’article du SMS en est la dernière illustration.

            Rappel des faits : le 06 février 2008, dans un article publié par Le Nouvel Obs.com, intitulé « L’obsession de Cécilia », le journaliste Airy Routier prétendait que le président avait envoyé, une semaine avant son mariage avec Carla Bruni, un SMS à son ex-épouse, Cécilia, dans lequel il aurait écrit ces mots : « Si tu reviens, j’annule tout ! ».

            Le 07 février, une plainte était alors déposée au Parquet de Paris contre Le Nouvel Obs.com, par Maître Thierry Herzog, l’avocat de Nicolas Sarkozy, pour faux, usage de faux et recel. De tels délits étant punissable de 45 000 euros d’amende et 3 ans d’emprisonnement. Le chef de l’état démentaient donc l’existence de ce SMS par la voie judiciaire. S’en suivit une polémique entre proches de Nicolas Sarkozy, comme Rama Yade, pourtant Secrétaire d’état aux droits de l’homme, traitant de « charognards » ceux qui voulaient « la peau de Nicolas Sarkozy » et ceux, défenseurs des droits des journalistes qui voyaient dans ce geste une volonté présidentielle de faire pression sur  les médias.

            L’enquête était donc toujours en cours pour déterminer les faits, lorsque dans son édition du 19 mars, Le Monde publiait la tribune de Madame Bruni-Sarkozy intitulée « Halte à la calomnie ! » dans laquelle elle annonçait que Nicolas Sarkozy retirait sa plainte contre  le journal, et l’accompagnait d’une leçon de moral aux journalistes. Fin de la plainte, fin de l’enquête, fin de la polémique.

            « Beaucoup de bruits pour rien » aurait écrit Shakespeare, « le résumé d’un an de gouvernance » écrirait l’analyste politique. «Sur»-réaction, contradictions, intimidation, rétractation, telles sont les attitudes adoptées par la présidence dans cette affaire sommes toutes mineure, comme malheureusement dans d’autres plus graves, et qui démontrent une fébrilité certaine quant à l’exercice du pouvoir.

            Sur le fond de l’affaire, que les choses soient claires on se fiche éperdument de savoir si Nicolas Sarkozy a relancé Cécilia une semaine avant son mariage avec Carla. La vie à l’Elyséee n’a pas à devenir un sitcom qui concurrencerait « Desperate Housewives », et Cécilia n’a pas pour vocation à être une nouvelle Teri Hatcher. A ce titre, le fond de l’article de nous intéresse pas. Et la réaction de Nicolas Sarkozy à celui-ci semblait d’autant plus disproportionné.

            Alors, la fin des poursuites pour apaiser les esprits ? Pas si simple. Dans son article la femme du président laisse sous-entendre un geste de magnificence de la part de son mari faisant suite à une lettre d’excuse du journaliste. Hauteur d’âme présidentielle retrouvée dans un entre deux tours d’élections municipales défavorables diront les sceptiques.

             Mais quid alors de la réaction première du président ? Réaction qui suscita une réelle interrogation et le fond de la polémique tant elle fût surprenante et disproportionnée. En attaquant très fort le journal, Nicolas Sarkozy a voulu faire éclater devant les tribunaux la vérité, ou plutôt le mensonge, de l’article. Faisant passer le message suivant : au-delà de son cas personnel, les journalistes sont tenus de dire la vérité rien que la vérité, et doivent pouvoir le prouver. La liberté d’expression et le secret des sources contre la vie privée et l’honneur d’un homme : éternel débat de nos démocraties.

             Débat qui avait été mis en sourdine, du moins le pensait-on, en ce qui concernait les présidents de la république. Personnage illustre, au-dessus du peuple, dans la cinquième république, la vie privée de celui-ci n’était pas thème à articles et surtout le président, bénéficiant de l’immunité judiciaire, s’abstenait d’utiliser la justice pour régler des litiges personnels contre de simples justiciables au risque sinon de mettre en évidence cette suprême et injuste inégalité devant la loi.

            Mais ce n’est que la coutume, et Nicolas Sarkozy n’en a cure. Le droit lui accorde la possibilité d’attaquer, il la saisit. En portant plainte au Pénal, il oblige le journaliste à divulguer ses sources rentrant alors en complète contradiction, une fois n’est pas coutume, avec ces propres propos tenus lors de ses vœux  à la presse le 08 janvier 2008 : « Un journaliste digne de ce nom ne donne pas ses sources. » . Répondant à une question de la présidente de l’Association de la presse présidentielle, il acquiesçait à l’idée de « prendre une décision forte pour le respect de la protection des sources, l’un des piliers de la liberté de la presse ». On voit quelle décision ! Agissant donc à l’encontre de ce qu’il reconnaissait lui-même comme des principes élémentaires et fondamentaux de la liberté d’expression, pilier de la démocratie.

            Dans cette optique, la véracité de l’existence ou non du  SMS prend alors toute son ampleur. Le président souhaite-t-il sanctionner un organe de presse pour avoir délibérément menti et l’avoir calomnié dans le cas où le SMS n’existerait pas ? Ou sommes-nous en présence, dans l’hypothèse où le SMS est réel, d’un abus de pouvoir caractérisé et d’une atteinte délibérée au droit à l’information ?

             Réponse cruciale. Car dans le premier cas, le journal devra être condamné pour les délits reprochés. Dans le second, ce sera au président de rendre des comptes.

             Mais voilà, cette réponse nous ne l’aurons pas. La justice n’aura pas à trancher, car le président plaignant a, une fois de plus, changé d’avis en retirant sa plainte. Volte-face malheureuse qui laisse les citoyens sans réponse, et d’autant plus dubitatifs que les arguments avancés pour justifier ce retrait (une lettre d’excuse d’ Aury Routier, que Madame Bruni-Sarkozy, dit avoir reçu, sous-entendant un aveu de culpabilité du journaliste) sont peu explicites voir incompréhensibles : le journaliste continuant  même à affirmer que son article repose sur des faits avérés, maintenant l'existence du SMS. Et aux Français de continuer à se demander s’ils ont été les témoins d’une tentative de calomnie, ou d’un abus de pouvoir caractérisé.

Alexandre Joly.

05:56 Publié dans Actu France | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : sarkozy, sms, presse

11 décembre 2007

Affaires étrangères... aux promesses

Rarement visite officielle d'un chef d'état étranger n'a suscité autant de polémiques que celle que va faire en France le Guide de la Jamahariya libyenne, le Colonel Khadafi durant ces 6 prochains jours. Politiques, humanitaires et intellectuels s'opposent tant sur les motivations et conséquences de la venue du Guide en raison de son passé que sur le degré diplomatique qui lui est conféré.

La problématique libyenne a été bien posée par Claude Guéant, Secrétaire général de l'Elysée au JT de France 2 du 10 décembre : « Que devons-nous faire à l'égart de pays qui se sont mal comportés ? Est-ce que nous devons les laisser s'enfoncer (...) ou est-ce que nous devons les aider à se soustraire à ses activités que nous condamnons ?». Question kafkaïenne dont la réponse ne peut être donnée qu'après une analyse au cas par cas de l'évolution des dits pays. Alors quelles raisons valables Nicolas Sarkozy a-t-il pu trouvé à la Libye pour en faire un pays sur la voie de la rédemption ?

Ces raisons ont été bien résumées par Pierre Lellouch, spécialiste de politique étrangère à l'UMP en 3 points. Elles sont tout à fait valables car marquées du sens de la responsabilité, de la raison et du réalisme. : “Un, le pays a arrété son programme nucléaire militaire. Deux, il coopère complétement avec les services occidentaux sur la lutte contre le terrorisme. Trois, il s'ouvre au développement international. ».

Quant au contentieux sanglant entre les deux pays, Guillaume Denoix de Saint-Marc (Président du Collectif des familles des victimes du DC 10 d'UTA) a estimé qu'il fallait le dépasser car “c'est important si on ne veut pas que la Libye soit tentée de retourner vers ses vieux démons. »

Si le deuxième point peut prêter à contestation ce n'est pas tant à cause du point de vue du dirigeant libyen sur le terrorisme qu'il qualifiait dimanche d' « arme des faibles », que sur celui des responsables occidentaux qui manipulent le terme en dépit du bon sens (mais cela est l'objet d'un autre débat ). On pourrait aussi rajouter un quatrième point : la Libye est un client potentiel et fortuné pour l'industrie Française. Et aussi un cinquième plus personnel pour Nicolas Sarkozy, le Colonel est un des rares dirigeants à tendre une oreille attentive au projet d'Union Méditerranéenne du Président.

Donc, s'il est effectivement bienvenue de marquer symboliquement le retour de la Libye à des relations pacifiées avec le reste du monde par l'accueil de son chef d'état, la manière quant à elle peut susciter des reserves. Pas seulement à cause de la date choisie, comme l'a dit Rama Yade au journal Le Parisien, « parce qu'elle coïncide avec la Journée mondiale des droits de l'homme. Le choix de cette date est un symbole fort, je dirais même scandaleusement fort. » Mais parce qu'il existe en matière de protocole diplomatique des nuances qui servent à distinguer un pays sur le retour de ceux qui sont nos alliés et amis.

Et c'est bien cette absence de nuance, marque de fabrique de Nicolas Sarkozy, qui pose problème. Car si le Président est comme il l'a déclaré publiquement à Bruxelles ce week-end « heureux de recevoir » le colonel Kadhafi, on n'ose imaginer dans quel état d'excitation il doit se trouver au moment de rencontrer nos plus proches partenaires et ses homologues que sont Romano Prodi, Angela Merkel ou encore Jose Luis Zapatero... Pour reprendre l'expression de Jamel Debouz lors de la réception de son César en 2006, cela doit être « le 14 juillet dans son slip ».

Ce manque de retenu a été très bien résumé par Arnaud Montebourg ce lundi lorqu'il a dit : « Que des relations se rétablissent avec la Libye, oui. De là, à lui offrir les Champs Elysées et une centrale nucléaire et des armes de très hautes capacités... » il y a des étapes qui sont franchies beaucoup trop attivement.

Mais le cas libyen s'inscrit aussi et surtout dans une diplomatie sarkozyenne qui est aux antipodes des déclarations faites durant la campagne présidentielle. Déclarations que nous avons ici même réguliérement dénoncées tant elles étaient teintées d'  « irrealpolitik » pour reprendre le concept d'Hubert Védrine. Elles nous apparaissaient alors comme la preuve flagrante d'un manque de compétence, de vision et de lucidité en matière de politique étrangère du candidat-président.

Ce grand écart, nombreux sont ceux comme Bernard Henri-Lévy à le dénoncer : « Voilà un président qui s'applique avec beaucoup d'honêteté à nous dire que sur tous les terrains ce qu'il a promis il le fera... il y a un domaine où il ne tient pas parole c'est sur ces affaires des droits de l'Homme et ces affaires étrangères. » ( JT de France 2 du 08 décembre). Et de rappeler que Nicolas Sarkozy « a quand même été le seul avec le président Ahmadinejad à téléphoner à Vladimir Poutine pour le féliciter du résultat des élections. » Elections rappelons-le des plus truquées, et précédées d'une campagne électorale qui s'est résumée pour l'opposition privée d'expression à une série d'arrestations et de bastonnades policières...

On est donc loin, très loin, du discours du 28 février 2007 sur la politique étrangère du candidat Sarkozy qui voulait « une approche plus doctrinale des affaires internationales ». Cette approche avait notament pour socle son « deuxième grand objectif : promouvoir les libertés et les droits de l'homme sur la scène internationale ». Il dénonçait « les adeptes de la realpolitik (qui) ne sont pas si réalistes que cela » et ceux qui font « le sacrifice des valeurs au nom d'intérêts à court terme ».

Mais n'est-ce pas exactement ce qu'il fait aujourd'hui avec la Libye, la Russie mais surtout la Chine avec lesquelles il favorise l'intérêt commercial à court terme au détriment des enjeux démocratiques et stratégiques ? Les images navrantes lors du dernier sommet du G8 où Nicoals Sarkozy tendait son téléphone portable à Vladimir Poutine et le prenait à part pour « copiner » étaient à milles lieux de ses déclarations de février 2007 dans lesquelles il dénonçait « notre silence face aux 200 000 morts et 400 000 réfugiés des guerres de Tchétchénie » et trouvait « préoccupante » « l'évolution de la Russie ces derniers temps ». Mais à priori pas suffisament préoccupante pour s'aligner sur la politique plus réaliste et surtout plus critique d'Angela Merkel vis à vis de la Russie.

Parce qu'avec les relations internationales il oeuvre dans un domaine qu'il ne maîtrise pas et qu'il ne connaît pas contrairement à la chancelière allemande, un domaine où le plus patient et le plus fin est celui qui remporte la mise, un domaine dont la gestion du temps et de l'espace sont à l'inverse de son univers médiatico-politique, Nicolas Sarkozy passe d'un extrême à l'autre, de l'  « irrealpolitik » au cynisme kissingerien, sans politique claire et définie, sans stratégie pour l'avenir, et cela au détriment des intétêts à long terme de la France. Et avec des risques évidents pour l'avenir sachant qu'il n'a par la constitution, en matière de politique étrangère de comptes à rendre à personne. Omettant là aussi, sa promesse électorale de faire de la de politique étrangère de la France, « le résultat d'un débat démocratique » et de la sortir du «seul secret des chancelleries et des cabinets. »  

Alexandre Joly.

21 octobre 2007

François Bayrou chez J.M. Apathie (RTL)

 
A noter : ce qu'il dit des tests ADN.
 
Hervé Tisserand 

03 septembre 2007

La rentrée littéraire concerne aussi François Bayrou

Le 31 juillet 2007, l'émisson de la chaîne parlementaire (LCP), Ecrire la politique, a invité trois auteurs ayant écrit des livres sur François Bayrou et le centre.

 
 

 
Si vous souhaitez obtenir les références concernant les livres dont il est question dans cette émission, rendez vous sur le site de LCP ; une page leur est consacrée. 
 
Hervé Tisserand