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30 mars 2009

Marielle de Sarnez, figure de proue de l’esprit européen

Quelles sont en France les personnalités charismatiques les mieux à même de mener ce combat humaniste pour l’avènement, pas à pas, des « Etats-Unis de l’Europe », comme le prédisait Victor Hugo au milieu du XIXe siècle ?

Sans nullement tergiverser, notre réponse fusera, immédiate : Marielle de Sarnez, élue au Parlement Européen dès 1999, cofondatrice du Parti Démocrate Européen, réélue en 2004 et, aujourd’hui, tête de liste du MoDem (Mouvement des Démocrates) aux élections européennes.

Plus encore, pour nous, elle incarnerait l’espoir chez certains Français (qu’il faut espérer de plus en plus nombreux) de parvenir le plus tôt possible à de véritables « Etats-Unis d’Europe », intégrant harmonieusement les caractéristiques propres de chacun des états membres, puissant rempart contre les guerres intestines et si meurtrières qui déchirèrent l’Europe pendant des millénaires et transportèrent leurs ferments vénéneux (esclavagisme, colonialisme, impérialisme, expansionnisme, totalitarisme...) dans de nombreuses parties du monde, garants d’une économie assainie, d’un modèle politique à visage humain (la démocratie parlementaire), d’un modèle social, visant le bien-être individuel et collectif... et, plus directement, un organe de contrôle, de critique, de suggestions et de propositions, face à une Commission Européenne, trop souvent enfermée dans sa « tour d’ivoire », et à des Etats préoccupés de soucis domestiques et ... électoralistes.

Entrée en politique pour soutenir la candidature de Valéry Giscard d'Estaing à l’élection présidentielle de 1974, elle est l’une des « co-créatrices » de l’UDF (Union pour la démocratie française) en 1978. Dans les années 70 et 80, elle collabore successivement auprès des grandes figures de l'UDF, Jean Lecanuet, Simone Veil et Raymond Barre, avant d'être nommée secrétaire générale des États généraux de l'opposition en 1989.

De 1993 à 1997, elle est successivement conseillère, puis directrice de cabinet de François Bayrou au ministère de l'éducation nationale. Elle est ensuite secrétaire générale du groupe UDF à l’Assemblée nationale entre 1997 et 1998. En 1999, elle est élue au Parlement européen sur la liste conduite par François Bayrou. Elle fait partie des principaux fondateurs du Parti démocrate européen. Elle est réélue en 2004.
Parallèlement, elle devient en 2001 conseillère de Paris, élue dans le 14e arrondissement sur la lis-te d'union RPR-UDF. En 2007, elle est directrice de campagne de François Bayrou pour l’élection présidentielle française de 2007. En mai 2007, Marielle de Sarnez est candidate UDF-Mouvement Démocrate aux élections législatives françaises de 2007 dans la 11e circonscription de Paris, et obtient 7148 voix parmi 38 918 suffrages exprimés (59 996 inscrits) et ne peut se maintenir au second tour.

En octobre 2007, Marielle de Sarnez a été investie officiellement par la commission électorale nationale de l'UDF/Mouvement démocrate le 10 octobre pour être la candidate de son parti aux élections municipales à Paris dans le 14e arrondissement. Les listes du MoDem obtiennent 9,08 % des suffrages au niveau de la capitale entière. Marielle de Sarnez est la seule élue du MoDem au Conseil de Paris. Le 27 septembre 2008, elle est élue présidente du Mouvement départemental de Paris, au sein du Mouvement démocrate.
Lorsqu’elle était interrogée en mars 2007, lors de la campagne des élections présidentielles, sur sa vision de l’Europe et de F. Bayrou, elle répondait de la manière suivante : 

Ils imaginent tous deux une « Europe des deux cercles ». Le premier, élargi, concernerait les échanges, les règles de droit. Et le deuxième, celui qui regrouperait les pays de la zone euro, avancerait plus rapidement dans l’édification d’une Europe politique.
Mais, ajoute la députée européenne, cette discussion n’aurait aucun sens si l’on n’y associait pas les citoyens français. Elle se dit attachée à la réconciliation de la France du oui et de la France du non au projet de constitution européenne. Elle souhaite que l’on essaye de comprendre ce que chacun a cherché à transmettre comme message.
Elle conclut son intervention par une adresse vibrante : « Aujourd’hui plus que jamais, et on le voit au Darfour, le monde attend l’Europe. Et l’Europe ne pourra jamais se construire sans la France ».

Nous pensons ainsi et lui souhaitons un très bon courage et une très bonne chance dans la campagne des élections européennes qui s’ouvre et dont les enjeux pour notre avenir sont tellement plus importants que l’on peut se l’imaginer.

Olivier Jamet
Vous pouvez retrouver les deux derniers articles de Olivier Jamet dans leur intégralité ( illustrations, traduction japonaise) sur le site du Club de France de Nara.

27 mars 2009

Elections européennes : mode d’emploi

Au mois de juin, du 4 au 7, se dérouleront partout dans l’Union Européenne des élections pour renouveler le mandat quinquennal des députés européens. Quelle est la fonction de cette assemblée européenne ? Quels rôles peut-elle jouer dans l’avenir pour enrayer la crise économique, financière, sociétale, voire métaphysique, qui vient de fondre sur l’Europe, comme sur les autres continents, pour construire une nouveauté monde ? Précieux, primordiaux, « salvateurs », pourrait-on même dire, ou bien de second plan ? Nous le verrons ci-dessous.

Nous nous intéresserons d’abord à ce qu’est ce Parlement Européen, si mystérieux encore pour bon nombre de Français, en retracerons l’historique, en expliquerons la composition et les composantes politiques, verrons comment se reflètent la représentation et la représentativité politique des différents Etats, composant l’Union, et soulignerons, malgré l’imperfection actuelle du dispositif et la faiblesse des pouvoirs véritables, l’importance de ses missions.

Que peut faire le Parlement ? A quoi sert cette Assemblée ? Les députés européens peuvent-ils influencer les décisions prises souvent abruptement par la Commission Européenne, puissant organe exécutif supranational ? Ces trois questions en posent une quatrième, qui s’adresse, elle, en tout premier, à nos amis français : A quoi ça sert de voter aux élections européennes ?

Historique

Voyons d’abord l’historique de ce mouvement si fort, de ce raz-de-marée humaniste, refusant la guerre et la barbarie, et qui a vu après la guerre l’apparition successive de l’idée utopique d’une Europe démocratique et pacifique, puis de « L’Europe des 6», du contrat d’échange d’étudiants Erasmus, de l’Union Européenne d’aujourd’hui composée de 27 états souverains, et de l’Euro. Puis, nous nous concentrerons sur le parlement européen et ses pouvoirs.

La Communauté européenne du charbon et de l'acier (CECA) avait établi, en septembre 1952, une Assemblée commune de 78 membres issus des parlements nationaux des six pays constituant la CECA. Dans cette assemblée, les députés disposaient du pouvoir de sanctionner la Haute Autorité. Une rupture politique eut lieu en mars 1958 avec la création de la Communauté économique européenne (CEE) dont l'Assemblée parlementaire européenne, renommée Parlement européen en 1962, était alors dotée du seul pouvoir de consultation. En 1979, le nombre de parlementaires a été une nouvelle fois augmenté et les membres ont été élus directement par le peuple pour la première fois pour une durée de cinq ans. Ensuite l'effectif du Parlement européen a simplement augmenté à chaque élargissement ; le nombre de députés a également été revu à la hausse en 1994 après la réunification allemande et le Traité de Nice l'a porté à 732. Si le Traité de Lisbonne entre en vigueur, le Parlement européen comptera à partir de la législature suivante 750 députés (plus le président du Parlement qui n'aura pas le droit de vote).

Le nombre de députés au Parlement européen a augmenté progressivement, passant de 78 députés en 1952 à 788 en 2004, et 785 depuis janvier 2007.

Fonctions du Parlement

Le Parlement participe à l'élaboration de certaines directives et de certains règlements. Le conseil européen, ou Conseil (désignant le sommet des chefs d'État ou chefs de gouvernement des vingt-sept pays membres de l'Union européenne, assistés par les ministres des Affaires Etrangères, et du président de la Commission européenne) lui rend compte de son activité à l'issue de chaque présidence, tous les six mois. Le Parlement n’exerce cependant pas de contrôle sur le Conseil. Il approuve le président de la Commission choisi par le Conseil européen, ainsi que la composition de la Commission. Il peut dans certaines conditions la forcer à démissionner par une motion de censure. Il participe au vote de la partie dépenses du budget de l’UE.

Par certains aspects, le Conseil des ministres et le Parlement européen ressemblent aux chambres haute et basse d’un système « bicaméral », tel que nous le connaissons au Japon ou en France. Mais, ni le Parlement ni le Conseil ne peuvent être à l'initiative de lois, ce pouvoir étant réservé à la Commission (article 17-2 du Traité de l'Union européenne), ce qui confère à celle-ci un (trop ?) grand pouvoir. Le fait que le Parlement européen ne puisse pas lui-même proposer des lois le distingue de la plupart des parlements nationaux et l’affaiblit considérablement.

Cependant, l'article 192 du traité d'Amsterdam (article 225 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne) précise aussi que : « La Commission tient compte des demandes de présentation de propositions législatives faites par le Parlement européen ou le Conseil... »

Toutefois, en aucun cas, le Parlement européen ne peut seul prendre l'initiative d'un acte législatif (directive, règlement ou décision) : il n'a pas de droit d'initiative législative.

Le Parlement élit pour cinq ans le président de la Commission européenne, mais seulement sur proposition du Conseil européen (les chefs d'État), qui tient compte des résultats des élections au Parlement européen. Les autres membres de la Commission sont alors désignés par le Président « en raison de leur compétence générale et de leur engagement européen et parmi des personnalités offrant toutes garanties d’indépendance » et non pour correspondre à la majorité parlementaire. Le Parlement accepte ou rejette en bloc la composition de la Commission.

Le Parlement européen exerce une certaine surveillance de toutes les activités de l'UE, particulièrement celles de la Commission. Le Parlement peut ainsi censurer et donc démettre la Commission dans son ensemble, mais seulement à la majorité des deux tiers des suffrages exprimés.

Le Parlement nomme également le « médiateur européen » pour 5 ans.

En conclusion, certains considèrent qu'utiliser le terme de “Parlement” pour l’assemblée réunissant les députés européens serait un « abus de langage », car il ne dispose ni d’un pouvoir législatif plein et autonome ni d’un réel pouvoir de contrôle et de sanction du véritable exécutif, la Commission européenne

Augmentation progressive du pouvoir réel

En 1957, le Parlement n’était qu’une assemblée composée de députés des parlements nationaux sans aucun pouvoir. Il n’était donc pas question de lui permettre de déposer des propositions de lois. Il a fallu attendre le traité d'Amsterdam pour qu'il acquiert un pouvoir d'initiative législative très limité, puisqu'il ne peut aller plus loin que demander un projet de loi à la Commission.

Toutefois, il a fini, petit à petit, par acquérir de plus en plus de poids sur la scène politique européenne :
. en contrôlant la Commission :
- la Commission Santer est poussée à la démission en mars 1999, suite notamment à la mise en cause pour délit de favoritisme d'Édith Cresson par la justice belge ;
- la Commission Barroso est critiquée lors de sa nomination en 2004, Et ce veto remit en cause tous les commissaires proposés par Barroso.
. En mettant son veto à divers textes soutenus par la Commission et les États membres :
- Brevetabilité des inventions biotechnologiques, le premier projet de directive rejeté (1995) ;
- Offres publiques d'achat, directive proposée une première fois en janvier 1989 et adoptée seulement en 2004 ;
. En récrivant en profondeur toute une série de directives, dans un sens très différent de celui proposé par la Commission :
- les brevets logiciels en Europe
- l'ex-projet de Directive Bolkestein dont l’objectif était d'assurer la libre circulation des services en Europe, très profondément remanié par le Parlement européen

. En créant des commissions d'enquête :
- En 1996-1997, une Commission temporaire pointe les retards d'intervention européenne lors de l'affaire de la « vache folle »
- En 2006, le parlement crée une commission d’enquête sur les activités de la CIA en Europe

Représentation

Le Parlement européen comprend, depuis le 1er janvier 2007, 785 membres représentant les 27 États membres de l'Union européenne. Le traité de Lisbonne prévoit de porter ce nombre à 751. S'il entre en vigueur à temps pour les prochaines élections européennes (Dimanche 7 juin 2009), il y aura alors 750 députés, sans compter le président (751 au total).

Le texte du traité sur l'Union européenne, potentiellement modifié par le traité de Lisbonne (art. 14-2), disposerait que :
« Le Parlement européen est composé de représentants des citoyens de l'Union. Leur nombre ne dépasse pas sept cent cinquante, plus le président. La représentation des citoyens est assurée de façon dégressivement proportionnelle, avec un seuil minimum de six députés par État membre. Aucun État membre ne se voit attribuer plus de quatre-vingt-seize sièges. »

Le Parlement européen représente plus de 492 millions de citoyens de l'Union. Ses membres sont appelés députés européens. Les élections, au suffrage universel direct, se déroulent tous les cinq ans. Les citoyens de l'Union ne sont pas également représentés au Parlement européen : les petits pays sont surreprésentés (comme le Luxembourg qui a un député pour 76 000 habitants) au détriment des grands pays (comme l’Allemagne qui a un député pour 860 000 habitants) : un électeur allemand pèserait donc onze fois moins qu'un électeur luxembourgeois. De mai-me la Belgique, le Portugal, la République tchèque, la Grèce, et les grandes régions françaises du Sud-est ou de l'Île-de-France ont chacun une population oscillant entre 10,4 et 11 millions d'habitants, mais les premiers éliront 24 députés, les dernières 13 à 14 seulement. Comme le nombre de députés accordé à chaque pays résulte des négociations dans les traités, il n’y a pas de formule précise sur la répartition des sièges parmi les États membres. Aucun changement de cette configuration ne peut se produire sans consentement unanime de tous les gouvernements.

Représentativité politique

Les partis politiques au Parlement européen sont organisés en un certain nombre de regroupements politiques et de partis politiques européens. Cependant, la plupart des députés restent membres de partis politiques nationaux et la discipline dans les partis et les groupements européens n'est pas rigide. Les délégations nationales et les députés eux-mêmes sont libres de changer de groupe.

On dénombre 7 « partis politiques européens »:
. le Parti Populaire Européen ou PPE,
. le Parti Socialiste Européen ou PSE,
. l’Alliance des Libéraux et des Démocrates pour l’Europe ou ALDE,
. le Parti Démocratique des Peuples d’Europe ou PDGE,
. le Parti de la Gauche Européenne ou PGE,
. le Parti Vert Européen ou PVE.

Les groupes politiques du Parlement européen sont distincts des partis politiques européens, bien qu’ils soient intimement liés.

Organisation des élections européennes de 2009

Les élections européennes de 2009 se dérouleront du 4 au 7 juin, dans les 27 États membres de l'Union européenne (samedi 6 et dimanche 7 juin en France). Les bureaux de votes seront ouverts à des jours différents selon la tradition de chaque pays, mais les résultats des vingt-sept États membres ne seront dévoilés que le dimanche soir, après 22 heures, heure de Berlin. Des pays comme l'Irlande et les Pays-Bas ont renoncé à utiliser des machines à voter pour ces élections de l'année 2009. Ce sera la septième élection européenne au suffrage universel direct. Le Parlement européen ne devant pas comporter plus de 750 membres. Si, comme c'est vraisemblable, c'est le traité de Nice qui s'applique à ce moment-là, le nombre de députés sera de 736.

Olivier Jamet.

20 mars 2009

Francophonie : retour sur l’affaire Ishihara

Comme vous avez très certainement dû ne pas vous en apercevoir tant les médias hexagonaux l’ont passé sous silence, ce vendredi 20 mars est la Journée de la Francophonie. Journée d’hommage qui n’aura malheureusement fait couler que très peu d’encre hors la Une du journal libanais L’Orient – Le Jour. Le pays du Cèdre accueillant en effet les cérémonies officielles, et donc les délégations des pays membres de l’OIF. Ce silence est malheureusement significatif du désintérêt des élites françaises chez qui Abdou Diouf, président de l’OIF, avoue ne pas « ressentir le militantisme francophone » des milieux intellectuels des autres pays.

Pour cette journée d’hommage à la langue française, de nombreuses manifestations sont aussi programmées à travers le monde, comme celles organisées à l’Institut de Tokyo ou à l’IFJ de Kobe le 21 mars.

A cette occasion nous avons souhaité revenir sur l’affaire qui a opposé de 2004 à 2009 un groupe de plaignants (voir leur site de soutien) au gouverneur de Tokyo, S. Ishihara, suite à ses violentes diatribes contre la langue française. Bien que l’épilogue de ce feuilleton judiciaire ait eu lieu il y a quelques semaines avec le rejet de la plainte par la Haute Cour de Justice, nous avons voulu reparler de l’affaire avec Malik Berkane, directeur d’une école de langue à Tokyo, qui est à l’origine des poursuites.

M. Berkane, pourriez-vous en quelques mots nous résumer l’origine de l’affaire qui vous a opposé au gouverneur de Tokyo ?

J’ai eu entre mes mains un pamphlet que des professeurs de l’ex-université municipale de Tokyo avaient rédigé et adressé au service culturel de l’ambassade de France à Tokyo, et dans ce pamphlet, ils reproduisaient les inepties du maire de Tokyo concernant la langue française. C’est de là que j’ai décidé dans un premier temps d’envoyer une lettre au maire de Tokyo pour lui demander sur quoi était basé sa déclaration sur notre langue, mais cette lettre est restée sans réponse. Devant l’immobilisme de notre représentation diplomatique qui n’a même pas daigné répondre au pamphlet mentionné ci dessus, j’ai pris la décision d’entamer une procédure judiciaire.

Sur quelles bases juridiques du droit japonais avez-vous fondées votre plainte ?

Sur la diffamation. Il y a eu au Japon ces dernières années des cas un peu similaires aux nôtres qui ont fait jurisprudence.

Pensez-vous que les propos de M. Ishihara ont eu un impact négatif sur l’image de la langue française au Japon ? Et en a-t-il découlé un préjudice financier pour les écoles de langue comme la votre par exemple ?

Il est difficile d’évaluer avec précision si oui ou non nous avons perdu des étudiants à cause de ces déclarations publiques, mais ce qui est certain, c’est que d’aucune façon ce genre de propos ne peut contribuer favorablement au rayonnement de notre langue et de notre pays au Japon.

Pendant votre procès, avez-vous été en contact avec les autorités françaises ? Et quelles furent leurs réactions ?

Oh oui ! Leur réaction a été d’opter pour la politique de l’autruche. Ce qui m’a été dit à plusieurs reprises, c’est que M. Ishihara était un amoureux déçu de la France, mais qu’il ne pensait pas vraiment ce qu’il disait et que de toute façon c’était un partenaire économique privilégié et qu’à ce titre, l’ambassade ne pouvait en aucun cas se permettre d’engager une polémique qui risquerait de nuire aux intérêts de la France et plus particulièrement à ceux du Lycée Franco-Japonais.

Selon M. Ishihara, l’ambassadeur de France lui aurait confié : « Vous avez tout à fait raison (...). J’ai moi-même des difficultés à compter en français. » Avez-vous eu confirmation de tels propos ? Et comment avez vous réagi ?

Je ne pense pas qu’il ait dit qu’il avait des difficultés à compter en français. (NDLR : Ce sont pourtant les propos que cite l'AFP dans une dépeche du 13 février 2008) Ishihara a déclaré devant des caméras de télé et après que nous avons été déboutés lors du premier procès que l’ambassadeur qu’il connaissait personnellement très bien était tout à fait d’accord avec ses propos concernant la langue française. Quand je me suis adressé à l’ambassade le lendemain pour confirmation, on m’a répondu que le rôle de l’ambassade n’était pas de faire des commentaires sur les déclarations des élus japonais.

Sur un plan personnel, avez-vous tiré un enseignement particulier d’une telle histoire ?

Tout ceci est malheureusement venu confirmer ce que je savais déjà au sujet de ces personnes qui représentent notre pays au Japon. Ce sont des irresponsables qui ne veulent prendre aucune décision qui pourrait peut-être nuire à leur carrière, et pour la plupart, ils ne sont absolument pas à la hauteur de leurs tâches et de leurs devoirs. C’est d’ailleurs pour cela que ça marche si mal du côté de la langue française. Si l’Etat français cessait du jour au lendemain d’injecter des fonds dans nos Instituts et nos Alliances, pas un seul de ces établissements ne survivrait avec la médiocre gestion de leurs directeurs et des services culturels. Quoi qu’il en soit, j’ai dépensé beaucoup d’argent et de temps dans ce combat et malgré une issue défavorable je garde la tête haute et ce que nous avons fait avec toutes les personnes qui ont soutenu cette action aura peut-être servi à réveiller des consciences. Pour finir, j’aimerais vous dire que les professeurs japonais qui enseignent notre langue dans les universités au Japon se sont sentis affreusement abandonnés par l’ambassade de France et son service culturel.

Entretien réalisé par Alexandre Joly.

16 mars 2009

Réunion de la section Japon

Dimanche 15 mars 2009 de 14 à 16 heures, la réunion mensuelle des adhérents du Modem résidant au Japon s’est tenue à Tokyo.

 

En introduction de cette réunion, le président provisoire de la section a présenté l’état d’avancement du processus d’adoption du Règlement Intérieur du MDFE Asie et informé les adhérents des discussions au sein du MDFE.

 

Il a été décidé que lors de la prochaine réunion nous procéderions à un débat, suivi du vote, du projet de  Règlement Intérieur de la section que proposera le Bureau provisoire.

 

Tous les adhérents du Modem résidant au Japon sont invités à participer à ce vote.

 

Notre prochaine réunion se déroulera le dimanche 19 avril à 14 heures.

 

Alexandre Joly.

07 mars 2009

8 mars : Journée internationale des femmes

Ce dimanche 8 mars aura lieu la Journée internationale des femmes, nous voudrions vous présenter une fête qui connut ses heures de gloires au XXe siècle et qui reste aujourd’hui encore largement célébrée en France, en Europe et en Amérique du nord.

La Journée internationale des femmes a été officiellement reconnue par les Nations Unies en 1977. Le gouvernement français l’a, pour sa part, officiellement adopté en 1982 au début du premier septennat du Président François Mitterrand .

L’origine de la célébration de ce jour est étroitement liée aux revendications des ouvrières à la fois d’un mieux-être social et de l’égalité.
Le 8 mars 1902, les ouvrières d’Amiens, bientôt suivies par d’autres ouvières un peu par-tout en Europe, manifestèrent pour faire valoir leurs droits. Le gouvernement ne tarda pas à prendre contre elles des mesures violentes mais le mouvement pour l’égalité des femmes était né et rien ne pouvait plus le faire disparaître.

En 1910, une confédération internationale des femmes socialistes se tint à Copenhague un 8 mars. C’est là que fut proposée la création d’une journée consacrée aux femmes du monde en-tier. Tout naturellement la date du jour était choisie. Elle ne deviendrait cependant fixe qu’à partir de 1917 lors de la grève des ouvrières de Saint Petersbourg. Le but de ces journées était à l’origine d’obtenir l’accès au vote par les femmes et cela dans tous les pays.

De nos jours, chaque année, le 8 mars, de nombreuses manifestations féminines sont organi-sées sur tous les continents avec, pour revendications, l’amélioration de la condition féminine, l’égalité des droits des hommes et des femmes dans tous les domaines et principalement au niveau de la loi, de la vie politique, des métiers et des salaires. Différents autres événements ont lieu, conférences, ren-contres, colloques, célébrations festives ; la presse écrite, audiovisuelle et multimedia traite en détail de la situation féminine. Depuis le 8 mars 2001, un site web permanent est consacré à cette journée afin d’archiver et de diffuser tout l’historique de la condition des femmes à travers le monde et à travers les époques.

La création d’une « Journée internationale des femmes » a été proposée pour la première fois en 1910, lors de la 2e Conférence internationale des femmes socialistes, par Clara Zetkin (1857-1933), révolutionnaire alle-mande, participante au mouvement spartakiste de Berlin en 1919, députée du Reichstag. Cette journée s’inscrivait alors dans une perspective révolution-naire. Dès 1911, des manifestations étaient organisées en Autriche-Hongrie, au Danemark, en Suisse, en Allemagne, puis les années suivantes en France, aux Pays-Bas, en Russie et en Suède. La date de la célébration n’est tout d’abord pas fixe, et ce n’est qu’à partir de 1917, avec la grève des ouvrières de Saint-Pétersbourg réclamant du pain et le retour de leurs fils ou de leur mari du front (qui eurent pour conséquence la chute du gouvernement, l’abdication du Tsar et la montée en puis-sance du mouvement bolchévik qui prit le pouvoir à l’issue de la Révolution d’Octobre), que la tradition du 8 mars se met définitivement en place.

Le 8 mars 1921, Vladimir Ilich Lénine décrète le 8 mars Journée des femmes en URSS.. En 1924 : La journée est célébrée en Chine. En 1946 : la journée est célébrée dans les pays de l'Est. Le 8 mars 1947, le socia-liste Léon Blum à l’origine du Front Populaire de 1936, de la semaine de 40 heures et des congés payés obligatoires, salue la place importante des femmes dans la Résistance contre l’Ennemi et la Collaboration. A partir de 1971, cette journée est célébrée au Québec.

La reconnaissance des Nations unies

Le 8 mars 1977 marque la reconnaissance des Nations Unies qui officialisent la célébration de cette Journée internationale de la femme.

La Charte des Nations Unies, signée à San Francisco en 1945, avait été le premier instrument international à proclamer l’égalité des sexes en tant que droit fondamental de la personne humaine.

Au fil des ans, l’action menée par l’ONU en faveur de la promotion de la femme a pris quatre orien-tations précises :

. promotion de mesures juridiques;
. mobilisation de l’opinion publique et de l’action internationale;
. formation et recherche, y compris constitution de statistiques ventilées par sexe;
. assistance directe aux groupes de femmes désavantagés.

Aujourd’hui, l’un des principes d’organisation centraux des travaux de l’ONU est qu’aucune solution dura-ble aux problèmes sociaux, économiques et politiques les plus pressants de la société ne puisse être trouvée sans la pleine participation, et la pleine autonomisation, des femmes du monde entier.

L’origine de cette journée s’ancre donc dans les luttes ouvrières et les nombreuses manifestations de femmes récla-mant le droit de vote, de meilleures conditions de travail et l’égalité entre les hommes et les femmes, qui agitèrent l’Europe, à la fin du XIX e et pendant le XXe siècle.

Le 8 mars à Paris...

Le Petit Palais présentera les 7 et 8 mars 2009 un ensemble d’images de femmes au XIXe siècle...
De la femme du peuple, retroussant ses manches, à la déesse sublime, en passant par la célèbre actrice Sarah Bernhardt, muse et amie des artistes ou l’anonyme modèle sur le corps duquel se concentre la recherche picturale d’un Courbet ou d’un Cézanne, cette visite - mise en œuvre par une conférencière - invite à découvrir quelques unes des mille et une facettes de la femme, au cœur de la création artistique du XIXe siècle.

Le Musée Cernuschi organisera une visite sur le thème "La femme à l’époque des Tang".

L’Unesco offrira cette année une série de tables rondes, de conférences, d’expositions et de manifestations culturelles au cours desquelles seront mises en lumière les questions rela-tives à l’autonomisation des femmes et à la promotion de l’égalité et de la parité
Arènes et Stades Paris 18e : A l’occasion de la Journée internationale de la Femme du 8 mars 2009, l’association Arènes et Stades, en partenariat avec les associations et clubs du 18ème arrondissement, organisera au Stade des Fillettes, dans le cadre des ses activités de la course à pied « la Francilienne » une journée " sport au féminin ". Plusieurs matches auront lieu, de football, basket, volley, rugby et de hand ball. Il y aura également une course à pied " la course du 8 mars ", puis la projection du film " Femmes et Sport " et enfin une table ronde " Filles, Sport et Egalité des chances ".

Le 8 mars à Montréal...

À l'occasion de la Journée internationale des femmes, le comité d'action et de coordination des femmes de diverses origines pour le 8 mars présente la manifestation intitulée « Les femmes exigent un nouvel ordre mondial », exprimée dans le slogan lapidaire : « Non à l'impérialisme, l'occupation, la guerre, l'exploitation et la répression ! »
Chaque année, une marche se déroule à travers les rues de Montréal pour célébrer et pour affirmer la solidarité avec les luttes quotidiennes de toutes les femmes, communautés et peuples opprimés.

Le 8 mars sur Arte...

À l’occasion de la Journée de la Femme qui aura lieu le 8 mars, ARTE propose une programmation spéciale sur les femmes et leur place dans la société, du mardi 3 au dimanche 8 mars 2009. Avec notamment six documentaires inédits et deux soirées spéciales :

THEMA « Les femmes sont-elles des hommes politiques comme les autres ?»

Mardi 3 mars 2009 à 20.45 : Dati l’ambitieuse. Documentaire de Taly Jaoui et Antoine Vitkine (2009, 40mn). Née de parents immigrés dans une banlieue pauvre, devenue ministre de la Justice, Rachida Dati est-elle un symbole d’intégration ou un cas particulier ?

Suivi à 21.30 de : Elles veulentchanger le monde. Documentaire de Marissa Cattini, Fabrice Gardel et Cathy Mespoulède (2009, 40mn). La femme est-elle l’avenir de la politique ? Entre débats enthousiastes et éclats de rire, rencontre avec les participantes du Women’s Forum qui s’est tenu à Deauville en octobre dernier.

THEMA « Etre femme »

Dimanche 8 mars 2009 à 22.30 : La lune en elles, un secret trop bien gardé. Documentaire de Diana Fabianova (2008, 80mn). Diana, jeune trentenaire slovaque, s’interroge sur ses règles. Débute ainsi une quête opiniâtre aux racines mêmes de la féminité, un questionnement sur la place de la femme dans nos sociétés. Avec l’intervention d’universitaires, médecins, philosophes et anthropologues.

Le documentaire sera précédé à 20.45 du film « Une affaire de femmes » de Claude Chabrol (1988, 103mn), avec Isabelle Huppert, François Cluzet et Marie Trintignant.

Cette Fête Internationale des Femmes le 8 mars est, à nos yeux, un pas très important pour le pro-grès de l’Humanité dans son avancée vers plus d’humanité.

Olivier Jamet

Vous pouvez retrouver l'article complet ( illustrations, traduction japonaise) sur le site du Club de France de Nara.

02 mars 2009

Grave crise aux Antilles françaises :La France d’Outre-Mer en question ?

Taux de chômage record, coût de la vie qui crèvent les plafonds raisonnablement supportables, salaires de misère... Les départements d'outre-mer de la France vivent en ce début d’année 2009 une période difficile, et pas seulement du fait de la crise. Après la Guyane et la Guadeloupe, c'est au tour de la Martinique de s'embraser. L’île de la Réunion s’émeut également. Que se passe-t-il donc dans ces territoires très éloignés de Paris, chez ces « Français du bout du monde » ? L’histoire et ses erreurs humaines folles et fatales est-elle en train de revenir sous les feux de l’actualité ?

Un vent de révolte souffle sur les DOM. Là-bas, la crise ne fait qu'aggraver des conditions de vie dé-jà très difficiles, beaucoup plus difficiles qu'on ne l'imagine en regardant les paysages des cartes postales. Pour les uns, il y a d'alléchants dispositifs d'exonération fiscale ou des fortunes provenant de l’ère coloniale. Pour les autres, il y a la misère, la débrouille et la solidarité.
Nous présenterons dans un premier temps cette situation à la fois catastrophique et explosive. Nous essayerons d’en analyser les causes, puis nous remonterons l’histoire et verrons ce qu’étaient à l’origine ces territoires, en apparence paradisiaques et objets de toutes les convoitises.

Situation économique et sociale catastrophique

Si les chiffres du chômage en France sont en ce début 2009 en nette progression (8% chez les hommes, 9% chez les femmes en moyenne), ceux de l'outre-mer laissent sans voix. La Guyane compte plus de 20% de chômeurs. En Martinique, ce taux est de 21,2% ; en Guadeloupe, il atteint 22,7%, et à la Réunion il grimpe à 24%. Pour les jeunes, c'est pire. Près de 40% de chômeurs chez les moins de 30 ans en Guadeloupe, les chif-fres étant à peu près identiques pour la Guyane et la Martinique. Et si à la Réunion le taux de chôma-ge des moins de 25 ans, qui s'établit à 49%, est en baisse, c'est parce que, selon l'Insee, les jeunes ont quitté l'île fa-ce à cette situation catastrophique et ne sont donc plus comptabilisés comme chômeurs.
Quant aux Pays d'outre-mer (POM), la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française, on trouve peu de chiffres offi-ciels. La raison en est simple: le chômage n'est pas indemnisé. Pas d'Assedic, ni même de RMI (Revenu Mini-mum d’Insertion).

Un coût de la vie exorbitant

Circonstance aggravante, dans ces territoires, le coût de la vie est exorbitant. En Polynésie française, par exemple, le prix des logements est comparable, voire supérieur, aux loyers parisiens: 1000 euros pour un studio à l'entrée de Papeete, près de 1200 euros pour un trois-pièces à 10 km de la capitale, etc. Tout ce qui est nécessaire à la vie cou-rante est plus cher. Si on prend l’exemple de l'essence, en Guyane, le prix du litre de sans-plomb était à 1,77 euro fin 2008. Au même moment en France, il était à 1,55 euro. Résultat: deux semaines de paralysie totale et de blocage du réseau routier... Il en va de même pour les produits alimentaires, souvent importés. Leur prix atteint des sommets à cause du coût du transport, par avion pour les pro-duits frais. Et les commerçants en profitent souvent pour appliquer des marges substantielles, voire exorbi-tantes. Sur les rayonnages des hypermarchés, dans les territoires du Pacifique, on trouve ain-si des yaourts à plus de 15 euros le pack.
Au coût du fret s'ajoutent les taxes douanières, comme "l'octroi de mer" en Guyane, Guadeloupe, Martini-que et Réunion. Un impôt qui indigne les commerçants, parce qu'il s'applique non pas sur les produits ven-dus mais sur les stocks de produits importés. Depuis quelques années, et conformément à la législation européenne, cette taxe s'applique aussi sur les produits locaux, grevant un peu plus le portefeuille des habitants.

Sous le paradis naturel et fiscal, « enfer social » et esprit colonial

Si certains « tirent leur épingle du jeu » et s'en sortent même très bien financièrement, c'est qu'il existe un véritable traitement à deux vitesses pour les salariés. Il y a ceux qui viennent de France -les "métros" (métropole)-, et il y a les autres. Les fonctionnaires mutés outre-mer voient ainsi leur salaire augmenter de 35% dès qu'ils arrivent à la Réunion, de 40% quand ils s'installent en Guadeloupe, en Martinique ou en Guyane, et de plus de 100% dans les îles les plus éloignées de Polynésie française... La plupart du temps, les salaires des Fran-çais qui travaillent dans le secteur privé sont alignés sur ceux des fonctionnaires.

D’un deuxième côté, il y a les travailleurs locaux qui occupent le plus souvent des emplois ingrats et très mal pa-yés. D'autant plus mal payés que le montant du Smic, en Guadeloupe ou en Polynésie, est largement inférieur à celui de la métropole. D'après les syndicats, on compterait même en Guadeloupe près de 100 000 personnes vivant sous le seuil de pauvreté. Ailleurs, ce n'est guère plus brillant...

D’un troisième côté, et c’est peut-être le problème le plus grave et le plus dif-ficile à résoudre, perdurent des structures qui sont apparues au moment de la traite des esclaves et se sont solidifiées à la période coloniale. Les « békés » (familles françaises « blanches » descen-dants de colons) représentant 1 % de la population, maîtrisent en Martinique 40 % de l’économie et 52 % des terres agricoles. A la Guadeloupe, les « Blancs-Pays » (familles françaises « blanches » descendants de colons) ne représentent également que 1% de la population environ et ils sont détenteurs de 80 à 90 % des richesses... Leur fortune serait colossale. Ils sont en effet à la tête de toutes les grandes « enseignes » (entreprises de distribution) de l’île : Renault, Mitsubishi, Carrefour ou Monsieur Bricolage appartiennent à Bernard Ayotte, 110e fortune de France. La famille Lorette, elle, détient 35 entreprises ici, comme Peugeot, ou les stations-services Texaco.

Comme nous le verrons, L’histoire des Antilles est complètement différente de celle de la France. Les Antilles sont le fruit de la conquête des Amériques, de l’esclavage et de discrimination raciale. Longtemps, les richesses de ces colonies (en particulier la canne à sucre) ont été drainées vers la métropole, sans aucune contrepartie. La transformation de ces îles en départements d’outre-mer en 1946 n’a pas réussi à changer radicalement les choses, même s’il y a eu des améliorations.

Le fait que les prix sont historiquement élevés serait donc dû à la dépendance, héritée de la colonisation, des produits de la métropole, y compris lorsqu’il s ’agit de produits à l’origine antil-lais mais nécessitant une transformation (le sucre blanc). Toute tentative d’installer une agriculture et une industrie locale, autonomes autant que faire se peut, aurait été bloquée par ces lobby issus pour la majorité de familles d’anciens colons et tirant leurs revenus de l’import-export et de la distribution. Le coût du transport ne serait pas seul responsable de la vie chère. Un audit a été récemment lancé par Yves Jégo, Secrétaire d’Etat chargé de l’Outre-Mer, afin d’évaluer d’éventuelles marges abusives. Un récent rap-port d’experts vient, également, de s’intéresser à la politique des prix des pétroliers (Total et sa filiale Sara) qui se fournirait en mer du Nord alors qu’il y a du pétrole pas loin, au Venezuela...

Le fait que les salaires de la population locale sont historiquement si bas serait également lié au système colonial. Au départ, l’esclave noir n’était pas payé. Il était simplement nourri-logé-soigné. Et ce système perdura trois siècles. Après l’abolition de l’esclavage en 1848, les anciens esclaves sont devenus travail-leurs agricoles recevant des « salaires de misère », et cela dura jusqu’à la fin des années 1950. Une fois que les An-tilles sont devenues départements d’outre-mer, les lois sociales hexagonales ont commencé à y être appli-quées au fil du temps, mais, comme nous l’avons déja vu, l’octroi d’un sursalaire de 40 % aux fonction-naires métropolitains exerçant aux Antilles et le fait que leurs collègues antillais ont obtenu le même avan-tage après une grève en 1946 sont venus perturber gravement et pervertir le système, le tout provoquant une véritable fracture sociale.

Enfin un dernier élément viendrait encore ajouter à la complexité de la situation. Julien Mérion, politologue guade-loupéen, rattaché à l’université des Antilles, considérerait, que, derrière la crise sociale qui est réelle, il y aurait une crise identitaire. Selon lui, celle-ci est « profonde » et ne se limite pas à endosser le passé douloureux de l’esclavage. Elle inclut la revendication de se poser en peuple libre et souverain, capable de « se prendre en main» et de « décider par lui-même ». Ainsi, se trouve en réalité posée « une problématique institu-tionnelle et politique » – celle d’une autonomie, voire d’une indépendance, sans rompre les liens avec la France – «qu’il sera de moins en moins possible d’éluder ».

Après avoir présenté la situation telle qu’elle apparaît aujourd’hui dans sa problématique et dans les conflits gra-ves qu’elle pourrait provoquer à l’avenir si une très sérieuse médiation gouvernementale et une intense négociation entre toutes les parties en présence n’intervenaient pas très rapidement, retraçons maintenant succincte-ment l’historique de cette France des Antilles.

La France d’Outre-Mer

La France d'outre-mer, souvent désignée par l'abréviation DOM-TOM permet de désigner collectivement l'en-semble des terres sous souveraineté française situées hors métropole. Ces territoires sont tous d'anciennes colonies françaises. Les DOM-TOM ont une population de 2 624 505 habitants au 1er janvier 2009. L’expression DOM-TOM signifie Département d'outre-mer - Territoire d'outre-mer. Depuis le 18 mai 2007, le ministre chargé de l’Outre-Mer est Michèle Alliot-Marie (UMP), actuellement Ministre de l'Intérieur, assistée par le secré-taire d'État Yves Jégo depuis le 18 mars 2008, à qui incombe de fait la délicate tâche de mettre d’ac-cord les diffé-rentes parties antagonistes en présence.

Les départements et régions d'outre-mer, ( DOM ou bien DOM-ROM ou encore DROM) ont le même statut que les départements et régions métropolitaines. Ils sont régis par l'article 73 de la Constitution. Ce sont la Gua-deloupe, la Martinique, la Guyane et la Réunion (974). La Guadeloupe, la Martinique et la Guyane for-ment les départements français d'Amérique (DFA). En outre, les DOM-ROM font partie de l'Union européenne et en sont des « régions ultra-périphériques » (RUP), régions qui font partie de l'Union européenne mais sont situées très largement en dehors du continent européen.

Les quatre départements d'outre-mer sont d'anciennes colonies, restées françaises quasiment sans interruption depuis leur établissement au milieu du XVIIe siècle. Le statut de département d'outre-mer leur a été attribué par la loi du 19 mars 1946 formant l'Union française. Les personnes originaires des DOM ou y habitant sont dits les Domiens.

La Guadeloupe

A la fois une région d'outre-mer et un département d'outre-mer français (numéro 971), ce petit archipel des Antil-les (mer des Caraïbes) se trouve à environ 7 000 km de la France métropolitaine, à 600 km au nord des côtes de l'Amérique du Sud, et à 950 km au sud-est des États-Unis. Autrefois appe-lée calaou çaera, puis Karukera (« île aux belles eaux »), Guadeloupe tient son nom actuel du Monastère royal de Santa María, situé dans la ville espagnole de Guadalupe, dans la province de Cáceres en Estrémadure, dont la statue de la Vierge (la « Virgen de Guadalupe »), était vénérée par Christophe Colomb qui vint la remercier pour son aide lors de la découverte du « Nouveau monde ». Le département de la Guadeloupe regrou-pe administrativement cinq îles et de nombreux îlots. L'île de la Basse-Terre et l'île de la Grande-Terre consti-tuent la Guadeloupe stricto sensu. En dépendent administrativement la Marie-Galante, les îles des Sain-tes (au sud), la Désirade (à l’est).

L'histoire moderne de la Guadeloupe commence en novembre 1493, lorsque Christophe Colomb arrive dans l'île lors de son deuxième voyage. À l'époque, la Guadeloupe est peu-plée par les Caraïbes, peuple amérindien présent sur l'île depuis le VIIIe siècle. Elle était habi-tée auparavant par les Arawaks. À partir de 1635, Charles Liènard de l'Olive et Jean du Plessis d'Ossonville en prennent possession au nom de la Compagnie fran-çaise des îles de l'Amérique. C'est le début de la colonisation de l'île. En 1674, la Guadeloupe passe sous l'autorité directe de la couronne du roi de France et devient par la suite une dépendance de la Martinique. En 1848, sous la Deuxième République, l'esclavage est aboli. La Guadeloupe a participé à la seconde guerre mondiale en fournissant des hom-mes aux FFL Forces françaises libres (dirigées par le Général de Gaulle) pour participer à la résistance.

Le 19 mars 1946, les anciennes colonies de l’Empire français font place à « l’Union française », mais celle des Antilles françaises se rapprochent du statut de la métropole et deviennent des départements d’outre-mer : la Guadeloupe et la Martinique. Le 14 février 1952, dans la ville du Moule, est organisée une grève par les ouvriers de l'usine Gardel pour une hausse de leurs salaires, des barrages avaient été érigés par les grévistes sur le piquet de grève. Finalement, les militaires français sur place reçurent l'ordre de tirer sur la foule faisant 4 morts et 14 blessés. Ces événements sont appelés "Massacre de la St-Valentin". Des faits simi-laires eurent lieu les 25, 26 et 27 mai 1967 : des manifestations ouvrières en vue d'obtenir une augmentation salariale de 2,5 % seront réprimées par la police arrivée sur place qui tire sur la foule, entraînant la mort de 87 personnes.

La Martinique

Comme La Guadeloupe, La Martinique est à la fois une région d'outre-mer et un département d'outre-mer (numé-ro 972) français. Elle devrait son nom à Christophe Colomb qui la découvre en 1502. Selon l’historien Sydney Daney, l’île aurait été appelée « Jouanacaëra », par les Caraïbes, ce qui signifierait « l’île aux iguanes ». Elle est devenue française en 1635. Faisant partie de l'archipel des Antilles, elle est située dans la mer des Caraïbes, à environ 450 km au nord-est des côtes de l'Amérique du Sud.

Le peuplement de la Martinique est relativement récent. Son histoire est largement marquée par celle de la colonisation de l’Amérique, les guerres d’influence entre les anciens empires coloniaux européens, l’évolution des activités agricoles, l’éruption de la Montagne Pelée de 1902 et les calamités climatiques, ainsi que des reven-dications indépendantistes modernes.

Puissent ces lieux si originaux et attrayant de Guadeloupe et de Martinique parvenir à un équilibre humain et une harmonie sociale si mérités !

Olivier Jamet

Vous pouvez retrouver l'article complet ( illustrations, traduction japonaise) sur le site du Club France de Nara.