Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

20 mars 2016

20 mars : Journée de la Francophonie

Dans le cadre de la semaine de la Francophonie qui se déroule du 12 au 20 mars 2016, le Ministère de la Culture et de la Communication organise l'opération « Dis-moi dix mots » pour rendre hommage à la diversité des termes et expressions qui enrichie la langue française selon les cultures, régions et pays.
La FFE-Modem souhaite accompagner cette initiative en proposant sa définition de 10 mots clés fréquemment utilisés en politique, trop souvent galvaudés, et qui comptent particulièrement pour nous. Si certains mots peuvent avoir plusieurs sens et varier selon les régions, d’autres ont besoin qu’on leur fasse justice en s’élevant contre les utilisations abusives ou connotées dans le contexte politique

Francophonie

La théorie :
Souvent associée à l'art ou aux échanges culturels, la Francophonie a cependant aussi, depuis le  sommet de Hanoï en 1997 une définition politique.
Ni simple opposition à la domination de l'anglais, ni relique pour nostalgiques d'un empire colonial, la Francophonie est un « club » de pays qui ont en commun une langue, élément facilitateur de communication.
La Francophonie, à travers notamment l'OIF, forme un réseau actif au sein duquel la diplomatie peut agir pleinement.
Forum international, elle favorise l'éclosion d'un monde multipolaire qui axe la résolution des crises  sur la communication et la diplomatie.

Notre avis :
La Francophonie doit aller au delà de l’image de la défense de langue française et la diversité de la culture francophone. Comme instrument de diplomatie, elle doit pouvoir servir les populations francophones en mettant les moyens de l’OIF au service des échanges académiques, commerciaux et politiques. La richesse des idées se partager comme la richesse de la langue. Les députés et sénateurs des Français qui résident hors de France doivent jouer un rôle majeur dans cette entreprise et être à la fois les entremetteurs politiques privilégiés mais aussi les initiateurs auprès des citoyens sur le terrain.

Laïcité

La théorie :
Séparation de l’Église et de l’État, du pouvoir religieux de celui civil, la laïcité garantit la possibilité de vivre ensemble sous la règle d’or du respect mutuel quelque soient nos croyances.
La laïcité « à la française » c'est l'ensemble des lois qui de 1880 à 1905 ont entériné la séparation de l’État et de l’Église.

Notre avis :
Peut-être le mot le plus galvaudé du moment : revendiqué de l'extrême-gauche à l'ultra-droite dans des visions souvent opposées, il est pourtant un des concepts politiques les mieux définis, car inscrit et décrit dans la loi.
Loi de compromis en 1905, elle est le pilier du « vivre ensemble » à la française. Respectueuse de toutes les croyances, garante de leur libre expression, elle n'en reconnaît aucune pour mieux les défendre toutes.
Libérale, la laïcité à la française n'est ni un athéisme d'état, ni une neutralité passive : elle est la garante des droits fondamentaux à la liberté de conscience et à la liberté d'expression, dans le respect des règles communes de la République.

Libéralisme

La théorie :
Idéologie matricielle de la République, elle n'est paradoxalement en 2015 appréciée que par moins de 2/3 des Français (sondage Génération Libre).
Complexe à définir, confondu depuis les années 80 avec l'ultra-libéralisme, un des avatars du libéralisme « négatif » (selon l'expression de Isaiah Berlin), et son cortège de dérégulation et d' abandon par les états de leurs prérogatives, rares sont les formations françaises à s'en revendiquer.
Surtout que la France a aussi eu à subir les affres des dérives « totalitaires » (toujours selon I.Berlin) du libéralisme « positif » à travers le jacobinisme.

Notre avis :
L’épanouissement de l’être humain et la quête personnelle du bonheur ne peuvent exister en l'absence de liberté. La République s'est fixée et doit conserver pour première mission de la garantir à chacun que ce soit au niveau des libertés fondamentales de croyance, d'expression et de circulation qu'économique d'entreprendre et de créer.

Humanisme

La théorie :
Mouvement culturel et philosophique né au tournant du XVI ème siècle, l'Humanisme est à l'origine de notre civilisation européenne moderne. Reprenant la pensée du philosophe antique Protagoras que “L'Homme est la mesure de toute chose”, l'Humanisme est le terreau sur lequel les grandes idées modernes ont germé : le libre arbitre, la tolérance, la laïcité jusqu'à la démocratie..

Notre avis :
Nous plaçons l’homme au centre de chaque question de société. L’émancipation de la personne humaine, femme et homme, le respect qui lui est dû, son épanouissement, constituent donc la fin principale des organisations sociales. Toute personne humaine, quels que soient sa situation, son âge, son état de santé, valide ou handicapée, porte en elle, identiquement, intégralement, sa part d’humanité et a droit à un égal respect. Nous avons confiance dans la capacité de progrès de l’humanité, en science et en conscience.

Identité(s)

La théorie :
Relancé en 2007 avec le débat sur “l'identité nationale”, la recherche d'une définition politique à un concept qui préoccupe plus la sociologie et la psychanalise est un exercice périlleux mais révélateur des valeurs d'une formation politique.

Notre avis :
L’aspiration à voir reconnaître son identité est un besoin fondamental de l’être humain. C’est vrai d’un peuple, d’une communauté, comme cela est vrai d’une personne. L’histoire, la langue, la culture, les idéaux philosophiques ou religieux servent de repères pour constituer cette identité. Lorsque l’identité est niée, c’est un malaise profond : souvent, elle revient en boomerang, y compris sous forme d’intolérance ou de revendications violentes. Au contraire une reconnaissance sereine permet l’acceptation et la reconnaissance de l’autre. À l’intérieur d’un peuple, comme le peuple français, nous ne déclinons pas le mot « identité » au singulier. Chacun d’entre nous est fait de plusieurs identités d’origine, de culture, parfois de langue. Et il a le droit d’assumer ces identités au pluriel, de se sentir à la fois Français, Européen, originaire d’une région ou d’une histoire différentes, juif, musulman, chrétien, agnostique ou athée, aimant avec passion sa langue nationale et en même temps la langue de sa région ou de son pays d’origine. Tout cela est une richesse, le rayer ou l’effacer, ce serait une amputation.

Europe

La théorie :
Europe c'est l'histoire d'un nom qui remonte aux sources de notre civilisation, celle de la Grèce antique et qui embrasse l’empire romain, la religion chrétienne dans toutes ses confessions, la tradition juive, les grands mouvements philosophiques, particulièrement les Lumières, mais aussi les contacts historiques, de guerre ou de paix, avec d’autres cultures, notamment l’Islam, pour créer une civilisation qui porte une vision de l’homme et rayonne dans le monde.

Notre avis :
Notre Europe porte aussi un modèle de société, où créativité, Europe économique, et solidarité, Europe sociale, sont intimement mêlés. L’Union européenne est une communauté d’intérêts fondamentaux et de valeurs politiques dont la première est la démocratie. Aucun des pays européens ne peut, s’il demeure seul, défendre sa vision du monde et ses priorités face aux puissances planétaires. L’Europe politique est donc un impératif. Elle se construira en une démarche coopérative, dans laquelle chacun conserve son identité et sa volonté, et s’engage à préserver les identités des autres.

Solidarité

La théorie :
La vertu principale de toute société, et même de toute communauté, c’est la solidarité. La solidarité est une garantie contre les difficultés de la vie. Elle est en même temps un principe dynamique qui permet d’avancer, qui soutient les plus audacieux, puisqu’on sait que le succès des uns servira aussi aux autres.

Notre avis :
La Solidarité de l'instantané, c'est celle des premiers secours aux plus démunis, à ceux qui ont tout perdu, aux réfugiés.
La Solidarité comme politique, c'est al lutte contre  les inégalités, sociales ou culturelles, qui doivent être contenues et constamment réduites au travers du temps, car cette réduction des inégalités est constitutive de tout projet humaniste.

Écologie et développement durable

La théorie :
Récemment apparue dans le débat politique, l'écologie n'est cependant souvent relayée qu'à la marge de l'action publique, quand il ne s'agit pas uniquement de faire du "Green washing".
Le développement ne doit cependant pas se juger seulement au présent. Il doit se juger au futur. Les générations à venir sont concernées par nos décisions autant que les générations actuelles. Le seul vrai développement est donc le développement durable qui préserve le patrimoine naturel, les ressources, la terre, l’eau, le climat, les conditions de la vie en commun pour nos enfants et les enfants de nos enfants.

Notre avis :
Une écologie politique c'est donc revoir notre consommation d’énergie, notre modèle économique qui donnerait la priorité au long terme sur le court terme, une croissance qualitative et pas seulement quantitative, une solidarité réelle entre les générations, une gestion responsable des finances publiques. Cela passe aussi par le refus du déséquilibre persistant, dramatique, entre le Nord et le Sud, dans lequel les pays développés portent une si lourde responsabilité. Cet engagement exige un changement du modèle économique dominant sur la planète.

Centre

La théorie :
Le Centre est l'affirmation d'une force politique distincte de la droite et de la gauche.
Il promeut le dépassement des contraires, la modération entre les antagonismes politiques : conservatisme et progressisme sur le plan des réformes et des idées, interventionnisme et laisser-faire sur le plan économique.
En France, le Centre est apparu après la Révolution française. Dans l'Assemblée de 1791, il est la force principale constituée par les députés qui sont attachés aux principes et aux conquêtes de 1789, mais qui craignent autant la surenchère des proches du roi que celle des révolutionnaires extrémistes. Ils sont alors représentés par la tendance girondine, et par deux orateurs Mirabeau et Barnave. Le courant a traversé l'Histoire.

Notre avis :
Parce qu’il dépasse les dogmatismes, le Centre représente l'équilibre et la vraie force, celle qui agit avec efficacité dans l'intérêt de tous.
Il ouvre un renouveau de la vie politique par une volonté d'ouverture, de dépassement des clivages stériles droite/gauche, clivages qui ont démontré depuis plus de trente ans leur incapacité à réformer en profondeur le pays pour retrouver le chemin de la croissance et du leadership.
Il est le fruit d'une conviction inébranlable que le seul projet politique qui pourra se traduire réellement en actions positives déterminantes se fera, au delà des postures et des intérêts partisans des partis, par l'union des individus modérés, déterminés, et de bonne volonté de droite et de gauche pour construire ensemble un pays plus juste, plus puissant, plus moderne.
De même qu'il faut deux jambes pour marcher, il faudra l'appui de toutes les forces républicaines modérées de gauche et de droite pour diriger le pays vers un futur plus prospère.

Éthique

La théorie :
Du grec « Ethikon » (« la science morale, qui concerne le lieu de vie, les habitudes, les mœurs »), l'éthique est la partie de la philosophie qui envisage le fondement de la morale (éthique selon Platon, Aristote, Descartes, Kant, Spinoza, Tocqueville, Heidegger, Deleuze, Ricoeur, Comte-Sponville,...).
Dans un sens ordinaire, le terme éthique est synonyme de morale, et désigne une pratique ayant pour objectif de déterminer une manière conforme de vivre en société, et correspondant aux fins ou aux rôles de la vie de l’Être humain (exemple : recherche du bonheur ou de la vertu).
L'éthique s'applique alors à tous les domaines de l'activité humaine, comme la santé, le monde du travail, l'économie, les sciences, la culture, et bien évidemment la politique.

Notre avis :
Pour le Modem, le respect de l’Éthique républicaine est un engagement majeur. La fin ne justifie pas les moyens. Toute action politique doit s'inscrire dans une démarche de respect des idéaux républicains. Elle doit  être menée pour la promotion de l'intérêt général, avec la prise en compte des opinions minoritaires. Aucune entorse aux valeurs humanistes ne peut être justifiée par un quelconque intérêt partisan.
Nous sommes respectueux des points de vues des autres sensibilités républicaines, et le cas échéant intégrons ces autres points de vues pour améliorer une prise de position.

09 octobre 2009

Un Nobel prématuré ?

Ce vendredi 9 octobre 2009, le comité Nobel a remis son prix le plus prestigieux, celui de la Paix, au nouveau président des Etats-Unis, Barack Obama.

 

Cette distinction est une surprise.

 

Tout d’abord parce que sur les 205 « candidats », ce dernier n’était absolument pas considéré comme un « outsider ». L’ancien opposant zimbabwéen Morgan Tsvangirai, le dissident chinois emprisonné Hu Jia ou encore la militante afghane des droits de la Femme, Sima Samaar, semblaient plus crédibles car ils incarnaient réellement le combat contre l’oppression et s’inscrivaient dans la lignée des Aung San Suu Kyi lauréate en 1990, Lech Walesa en 1983 ou encore Nelson Mandela en 1993. En souffrant leur lutte dans leur chaire. 

 

Alors oui, le comité Nobel a souvent alterné dans ses distinctions hommes et femmes martyrisés comme on vient de le voir, organisations (AIEA en 2005, ONU en 2001…), mais aussi, comme avec Barack Obama, des dirigeants (Jimmy Carter en 2002, le trio Arafat/Rabin/Peres en 1994…) pour leurs actions en faveur de la paix.

 

Mais dans ce dernier cas, les lauréats étaient généralement honorés une fois déchargés de leur fonction (comme Jimmy Carter) ou après la mise en pratique et un changement significatif de politique, généralement symbolisés par un acte fort (accords d’Oslo de 1993 pour le trio ARP). 

 

Or, cette année, il vient distinguer un homme tout juste entré en fonction (à peine 9 mois) et dont l’action n’a naturellement et jusqu’à présent nullement modifié la donne internationale.

 

Certes, ces propos sur la dénucléarisation, le multilatéralisme ou la promotion d’une plus grande discussion interculturelle ont abouti au réchauffement des relations américano-russes, ou encore à l’adoption d’une résolution du Conseil de Sécurité des Nations Unies qui appelle à l’instauration d’un monde dénucléarisé.

 

Propos qui font office d’argumentaire au président du comité Nobel, Thorbjoern Jagland, pour justifier son choix quand il précise que « le comité a attaché beaucoup d’importance à la vision et aux efforts d’Obama en vue d’un monde sans armes nucléaires (…) pour ses efforts extraordinaires en vue de renforcer la diplomatie internationale et la coopération entre les peuples. »

 

Mais nous sommes là dans un monde de paroles et non d’actes. Encore moins de succès diplomatiques.

 

En parlant d’actes, il est d’ailleurs très surprenant que le comité ait accordé son prix à un président qui, à son poste, a refusé il y a quelques jours de rencontrer un de ses prédécesseurs, lauréat en 1989 : le Dalaï Lama. Relations sino-américaines obligent.

 

On pourrait alors se contenter de parler de précipitation et oublier.

 

Mais une question se pose : ce Nobel est-il judicieux et ne va-t-il pas avoir une influence sur la future politique étrangère d’Obama comme, dans un autre registre, le prix attribué au Dalaï Lama en a eu sur les relations de la Chine avec le reste du monde ?

 

On peut en effet s’interroger sur la pertinence d’avoir accordé un tel prix à un homme dont les convictions morales et le sens de l’éthique semblent suffisamment élevés pour ne pas prendre cette distinction à la légère. Ce, alors que Barack Obama a en ce moment même à trancher sur une demande de renfort de troupes en Afghanistan de l’ordre de 40 000 hommes de la part du Général MacKrystal, et que les dossiers iraniens, israélo-palestiniens ou nord-coréens peuvent s’envenimer à tout instant.

 

Or, il n’est pas certain qu’en cas d’obligation de la part des Etats-Unis de hausser le ton vis-à-vis de l’un de ces pays, son étiquette de Pacifiste lui soit un atout, tant ce terme est généralement synonyme de faiblesse dans toutes les dictatures du monde.  Il suffit de se souvenir comment Kim Jung Il a accueilli la prise de fonction de ce jeune et inexpérimenté président (essai nucléaire, tests de missile ballistique…).

 

Qui plus est, il n’est pas certain non plus qu’un tel prix renforce l’image du président dans son propre pays quand ses concitoyens attendent de lui des décisions fortes.

 

Si le comité Nobel espérait encourager le président Obama dans la mise en application de sa vision des relations internationales, intention louable, il se pourrait cependant bien qu’il lui ait fait un cadeau empoisonné et mis une pression bien inutile.

Alexandre Joly.

15 septembre 2009

Le MoDem en Russie

Depuis quelques semaines, nos confrères et amis de la section MoDem de Moscou, sous la houlette de leur dynamique président Laurent Couraudon, éditent un blog que je vous invite à découvrir en cliquant ici.

Bientôt réunies en une même circonscription électorale au sein de la 11ème circonscription des Français de l’Etranger par le projet de loi du Secrétaire d’Etat Alain Marlaix, Russie et Japon offrent aux ressortissants français qui y résident d’étranges similitudes. En effet, ces deux pays sont les seuls membres du G8 à ne pas avoir ratifié les accords de La Haye du 25 octobre 1980 sur les enlèvements d’enfants, notamment ceux binationaux. Dans la 11ème circonscription des Français de l’Etranger le Pakistan et la Chine, sauf territoires de Hong-Kong et de Macao, sont les deux autres grands pays à ne pas avoir signé cette convention (voir liste des pays signataires).

Cet état de fait est à l’origine de nombreux cas dramatiques dont nous nous sommes faits l’échos ici même pour le Japon, notamment en relayant les initiatives de l’association SOS Parents Japan et du réseau Oyakonet.

Les carences du droit russe ont quant à elles étaient mises en lumières lors de la très médiatique affaire de la petite Elise. Cette fillette que sa mère a, à deux reprises, enlevé alors qu’elle était sous la garde de son père en France et qui fût le sujet d’une « alerte enlèvement » relayée dans tous les médias nationaux au mois de mars.

Le MoDem Japon s’engage à rester mobilisé sur ce sujet.

Alexandre Joly
Président de la section MoDem Japon

20 mars 2009

Francophonie : retour sur l’affaire Ishihara

Comme vous avez très certainement dû ne pas vous en apercevoir tant les médias hexagonaux l’ont passé sous silence, ce vendredi 20 mars est la Journée de la Francophonie. Journée d’hommage qui n’aura malheureusement fait couler que très peu d’encre hors la Une du journal libanais L’Orient – Le Jour. Le pays du Cèdre accueillant en effet les cérémonies officielles, et donc les délégations des pays membres de l’OIF. Ce silence est malheureusement significatif du désintérêt des élites françaises chez qui Abdou Diouf, président de l’OIF, avoue ne pas « ressentir le militantisme francophone » des milieux intellectuels des autres pays.

Pour cette journée d’hommage à la langue française, de nombreuses manifestations sont aussi programmées à travers le monde, comme celles organisées à l’Institut de Tokyo ou à l’IFJ de Kobe le 21 mars.

A cette occasion nous avons souhaité revenir sur l’affaire qui a opposé de 2004 à 2009 un groupe de plaignants (voir leur site de soutien) au gouverneur de Tokyo, S. Ishihara, suite à ses violentes diatribes contre la langue française. Bien que l’épilogue de ce feuilleton judiciaire ait eu lieu il y a quelques semaines avec le rejet de la plainte par la Haute Cour de Justice, nous avons voulu reparler de l’affaire avec Malik Berkane, directeur d’une école de langue à Tokyo, qui est à l’origine des poursuites.

M. Berkane, pourriez-vous en quelques mots nous résumer l’origine de l’affaire qui vous a opposé au gouverneur de Tokyo ?

J’ai eu entre mes mains un pamphlet que des professeurs de l’ex-université municipale de Tokyo avaient rédigé et adressé au service culturel de l’ambassade de France à Tokyo, et dans ce pamphlet, ils reproduisaient les inepties du maire de Tokyo concernant la langue française. C’est de là que j’ai décidé dans un premier temps d’envoyer une lettre au maire de Tokyo pour lui demander sur quoi était basé sa déclaration sur notre langue, mais cette lettre est restée sans réponse. Devant l’immobilisme de notre représentation diplomatique qui n’a même pas daigné répondre au pamphlet mentionné ci dessus, j’ai pris la décision d’entamer une procédure judiciaire.

Sur quelles bases juridiques du droit japonais avez-vous fondées votre plainte ?

Sur la diffamation. Il y a eu au Japon ces dernières années des cas un peu similaires aux nôtres qui ont fait jurisprudence.

Pensez-vous que les propos de M. Ishihara ont eu un impact négatif sur l’image de la langue française au Japon ? Et en a-t-il découlé un préjudice financier pour les écoles de langue comme la votre par exemple ?

Il est difficile d’évaluer avec précision si oui ou non nous avons perdu des étudiants à cause de ces déclarations publiques, mais ce qui est certain, c’est que d’aucune façon ce genre de propos ne peut contribuer favorablement au rayonnement de notre langue et de notre pays au Japon.

Pendant votre procès, avez-vous été en contact avec les autorités françaises ? Et quelles furent leurs réactions ?

Oh oui ! Leur réaction a été d’opter pour la politique de l’autruche. Ce qui m’a été dit à plusieurs reprises, c’est que M. Ishihara était un amoureux déçu de la France, mais qu’il ne pensait pas vraiment ce qu’il disait et que de toute façon c’était un partenaire économique privilégié et qu’à ce titre, l’ambassade ne pouvait en aucun cas se permettre d’engager une polémique qui risquerait de nuire aux intérêts de la France et plus particulièrement à ceux du Lycée Franco-Japonais.

Selon M. Ishihara, l’ambassadeur de France lui aurait confié : « Vous avez tout à fait raison (...). J’ai moi-même des difficultés à compter en français. » Avez-vous eu confirmation de tels propos ? Et comment avez vous réagi ?

Je ne pense pas qu’il ait dit qu’il avait des difficultés à compter en français. (NDLR : Ce sont pourtant les propos que cite l'AFP dans une dépeche du 13 février 2008) Ishihara a déclaré devant des caméras de télé et après que nous avons été déboutés lors du premier procès que l’ambassadeur qu’il connaissait personnellement très bien était tout à fait d’accord avec ses propos concernant la langue française. Quand je me suis adressé à l’ambassade le lendemain pour confirmation, on m’a répondu que le rôle de l’ambassade n’était pas de faire des commentaires sur les déclarations des élus japonais.

Sur un plan personnel, avez-vous tiré un enseignement particulier d’une telle histoire ?

Tout ceci est malheureusement venu confirmer ce que je savais déjà au sujet de ces personnes qui représentent notre pays au Japon. Ce sont des irresponsables qui ne veulent prendre aucune décision qui pourrait peut-être nuire à leur carrière, et pour la plupart, ils ne sont absolument pas à la hauteur de leurs tâches et de leurs devoirs. C’est d’ailleurs pour cela que ça marche si mal du côté de la langue française. Si l’Etat français cessait du jour au lendemain d’injecter des fonds dans nos Instituts et nos Alliances, pas un seul de ces établissements ne survivrait avec la médiocre gestion de leurs directeurs et des services culturels. Quoi qu’il en soit, j’ai dépensé beaucoup d’argent et de temps dans ce combat et malgré une issue défavorable je garde la tête haute et ce que nous avons fait avec toutes les personnes qui ont soutenu cette action aura peut-être servi à réveiller des consciences. Pour finir, j’aimerais vous dire que les professeurs japonais qui enseignent notre langue dans les universités au Japon se sont sentis affreusement abandonnés par l’ambassade de France et son service culturel.

Entretien réalisé par Alexandre Joly.

07 mars 2009

8 mars : Journée internationale des femmes

Ce dimanche 8 mars aura lieu la Journée internationale des femmes, nous voudrions vous présenter une fête qui connut ses heures de gloires au XXe siècle et qui reste aujourd’hui encore largement célébrée en France, en Europe et en Amérique du nord.

La Journée internationale des femmes a été officiellement reconnue par les Nations Unies en 1977. Le gouvernement français l’a, pour sa part, officiellement adopté en 1982 au début du premier septennat du Président François Mitterrand .

L’origine de la célébration de ce jour est étroitement liée aux revendications des ouvrières à la fois d’un mieux-être social et de l’égalité.
Le 8 mars 1902, les ouvrières d’Amiens, bientôt suivies par d’autres ouvières un peu par-tout en Europe, manifestèrent pour faire valoir leurs droits. Le gouvernement ne tarda pas à prendre contre elles des mesures violentes mais le mouvement pour l’égalité des femmes était né et rien ne pouvait plus le faire disparaître.

En 1910, une confédération internationale des femmes socialistes se tint à Copenhague un 8 mars. C’est là que fut proposée la création d’une journée consacrée aux femmes du monde en-tier. Tout naturellement la date du jour était choisie. Elle ne deviendrait cependant fixe qu’à partir de 1917 lors de la grève des ouvrières de Saint Petersbourg. Le but de ces journées était à l’origine d’obtenir l’accès au vote par les femmes et cela dans tous les pays.

De nos jours, chaque année, le 8 mars, de nombreuses manifestations féminines sont organi-sées sur tous les continents avec, pour revendications, l’amélioration de la condition féminine, l’égalité des droits des hommes et des femmes dans tous les domaines et principalement au niveau de la loi, de la vie politique, des métiers et des salaires. Différents autres événements ont lieu, conférences, ren-contres, colloques, célébrations festives ; la presse écrite, audiovisuelle et multimedia traite en détail de la situation féminine. Depuis le 8 mars 2001, un site web permanent est consacré à cette journée afin d’archiver et de diffuser tout l’historique de la condition des femmes à travers le monde et à travers les époques.

La création d’une « Journée internationale des femmes » a été proposée pour la première fois en 1910, lors de la 2e Conférence internationale des femmes socialistes, par Clara Zetkin (1857-1933), révolutionnaire alle-mande, participante au mouvement spartakiste de Berlin en 1919, députée du Reichstag. Cette journée s’inscrivait alors dans une perspective révolution-naire. Dès 1911, des manifestations étaient organisées en Autriche-Hongrie, au Danemark, en Suisse, en Allemagne, puis les années suivantes en France, aux Pays-Bas, en Russie et en Suède. La date de la célébration n’est tout d’abord pas fixe, et ce n’est qu’à partir de 1917, avec la grève des ouvrières de Saint-Pétersbourg réclamant du pain et le retour de leurs fils ou de leur mari du front (qui eurent pour conséquence la chute du gouvernement, l’abdication du Tsar et la montée en puis-sance du mouvement bolchévik qui prit le pouvoir à l’issue de la Révolution d’Octobre), que la tradition du 8 mars se met définitivement en place.

Le 8 mars 1921, Vladimir Ilich Lénine décrète le 8 mars Journée des femmes en URSS.. En 1924 : La journée est célébrée en Chine. En 1946 : la journée est célébrée dans les pays de l'Est. Le 8 mars 1947, le socia-liste Léon Blum à l’origine du Front Populaire de 1936, de la semaine de 40 heures et des congés payés obligatoires, salue la place importante des femmes dans la Résistance contre l’Ennemi et la Collaboration. A partir de 1971, cette journée est célébrée au Québec.

La reconnaissance des Nations unies

Le 8 mars 1977 marque la reconnaissance des Nations Unies qui officialisent la célébration de cette Journée internationale de la femme.

La Charte des Nations Unies, signée à San Francisco en 1945, avait été le premier instrument international à proclamer l’égalité des sexes en tant que droit fondamental de la personne humaine.

Au fil des ans, l’action menée par l’ONU en faveur de la promotion de la femme a pris quatre orien-tations précises :

. promotion de mesures juridiques;
. mobilisation de l’opinion publique et de l’action internationale;
. formation et recherche, y compris constitution de statistiques ventilées par sexe;
. assistance directe aux groupes de femmes désavantagés.

Aujourd’hui, l’un des principes d’organisation centraux des travaux de l’ONU est qu’aucune solution dura-ble aux problèmes sociaux, économiques et politiques les plus pressants de la société ne puisse être trouvée sans la pleine participation, et la pleine autonomisation, des femmes du monde entier.

L’origine de cette journée s’ancre donc dans les luttes ouvrières et les nombreuses manifestations de femmes récla-mant le droit de vote, de meilleures conditions de travail et l’égalité entre les hommes et les femmes, qui agitèrent l’Europe, à la fin du XIX e et pendant le XXe siècle.

Le 8 mars à Paris...

Le Petit Palais présentera les 7 et 8 mars 2009 un ensemble d’images de femmes au XIXe siècle...
De la femme du peuple, retroussant ses manches, à la déesse sublime, en passant par la célèbre actrice Sarah Bernhardt, muse et amie des artistes ou l’anonyme modèle sur le corps duquel se concentre la recherche picturale d’un Courbet ou d’un Cézanne, cette visite - mise en œuvre par une conférencière - invite à découvrir quelques unes des mille et une facettes de la femme, au cœur de la création artistique du XIXe siècle.

Le Musée Cernuschi organisera une visite sur le thème "La femme à l’époque des Tang".

L’Unesco offrira cette année une série de tables rondes, de conférences, d’expositions et de manifestations culturelles au cours desquelles seront mises en lumière les questions rela-tives à l’autonomisation des femmes et à la promotion de l’égalité et de la parité
Arènes et Stades Paris 18e : A l’occasion de la Journée internationale de la Femme du 8 mars 2009, l’association Arènes et Stades, en partenariat avec les associations et clubs du 18ème arrondissement, organisera au Stade des Fillettes, dans le cadre des ses activités de la course à pied « la Francilienne » une journée " sport au féminin ". Plusieurs matches auront lieu, de football, basket, volley, rugby et de hand ball. Il y aura également une course à pied " la course du 8 mars ", puis la projection du film " Femmes et Sport " et enfin une table ronde " Filles, Sport et Egalité des chances ".

Le 8 mars à Montréal...

À l'occasion de la Journée internationale des femmes, le comité d'action et de coordination des femmes de diverses origines pour le 8 mars présente la manifestation intitulée « Les femmes exigent un nouvel ordre mondial », exprimée dans le slogan lapidaire : « Non à l'impérialisme, l'occupation, la guerre, l'exploitation et la répression ! »
Chaque année, une marche se déroule à travers les rues de Montréal pour célébrer et pour affirmer la solidarité avec les luttes quotidiennes de toutes les femmes, communautés et peuples opprimés.

Le 8 mars sur Arte...

À l’occasion de la Journée de la Femme qui aura lieu le 8 mars, ARTE propose une programmation spéciale sur les femmes et leur place dans la société, du mardi 3 au dimanche 8 mars 2009. Avec notamment six documentaires inédits et deux soirées spéciales :

THEMA « Les femmes sont-elles des hommes politiques comme les autres ?»

Mardi 3 mars 2009 à 20.45 : Dati l’ambitieuse. Documentaire de Taly Jaoui et Antoine Vitkine (2009, 40mn). Née de parents immigrés dans une banlieue pauvre, devenue ministre de la Justice, Rachida Dati est-elle un symbole d’intégration ou un cas particulier ?

Suivi à 21.30 de : Elles veulentchanger le monde. Documentaire de Marissa Cattini, Fabrice Gardel et Cathy Mespoulède (2009, 40mn). La femme est-elle l’avenir de la politique ? Entre débats enthousiastes et éclats de rire, rencontre avec les participantes du Women’s Forum qui s’est tenu à Deauville en octobre dernier.

THEMA « Etre femme »

Dimanche 8 mars 2009 à 22.30 : La lune en elles, un secret trop bien gardé. Documentaire de Diana Fabianova (2008, 80mn). Diana, jeune trentenaire slovaque, s’interroge sur ses règles. Débute ainsi une quête opiniâtre aux racines mêmes de la féminité, un questionnement sur la place de la femme dans nos sociétés. Avec l’intervention d’universitaires, médecins, philosophes et anthropologues.

Le documentaire sera précédé à 20.45 du film « Une affaire de femmes » de Claude Chabrol (1988, 103mn), avec Isabelle Huppert, François Cluzet et Marie Trintignant.

Cette Fête Internationale des Femmes le 8 mars est, à nos yeux, un pas très important pour le pro-grès de l’Humanité dans son avancée vers plus d’humanité.

Olivier Jamet

Vous pouvez retrouver l'article complet ( illustrations, traduction japonaise) sur le site du Club de France de Nara.

13 octobre 2008

Les Européens sont-ils vraiment prêts à mettre en place une défense européenne ?

La lecture d'un article de l'intellectuel néerlandais Ian Buruma, The Wrong Lesson of Munich, (Japan Times du 15 septembre 2008), permet de poser la question de la défense européenne dans des termes qu'on entend peu ou pas en France. Après une démonstration du traumatisme lié aux accords de Munich de 1938, Ian Buruma se demande si les Européens sont prêts et aptes à faire tout ce qu'il faut pour construire une défense européenne commune.

Il y a plusieurs raisons expliquant les difficultés de la mise en place d'une défense européenne commune.
La première raison est le choix de civilisation fait par les Européens. Les Européens s'enorgueillissent souvent de leurs capacités à instaurer des négociations diplomatiques entre adversaires. C'est pour cela que les accords de Münich sont un traumatisme car le jusqu'au boutisme diplomatique n'a en rien évité le pire, au contraire. Les états de l'Union Européenne ont souvent – pas toujours - misé uniquement sur la diplomatie par contrainte (manque de moyens militaires) mais aussi par choix (tout sauf une intervention armée). En cela, les gouvernements des pays membres expriment le sentiment pacifique dominant de leurs opinions publiques respectives surtout depuis la chute du bloc communiste. Comme l'a dit Robert Kagan, les Européens vivent dans un monde post hobbesien. Ils conçoivent le modèle de la construction européenne comme un modèle universel allant de soi. Mourir en faisant la guerre pour des intérêts stratégiques ou pour des idéaux n'est plus vraiment à l'ordre du jour. Il suffit de voir comment est perçue la guerre en Afghanistan.

Mais il y a aussi des raisons liées à l'évolution des puissances européennes depuis 1945.
Depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, les états européens ont pu construire une organisation commune principalement économique garantissant la paix entre eux. La fin des empires coloniaux de certains pays membres, la forte présence militaire américaine en Europe dans le contexte de la guerre froide via l'OTAN, tout cela a conduit à la perte d'importance relative des forces armées des différents pays dans leur budget.
Il faut également ajouter que malgré la coopération entre les états européens n'a pas gommé les différences de vue en matière de politique étrangère. La Suède et L'Espagne n'ont pas souvent les mêmes priorités diplomatiques de par leur histoire, leur poids dans les affaires du monde, leur zone d'influence, etc. Le conflit russo-géorgien a mis en exergue ces différences de vue.

Les Européens critiquent souvent l'unilatéralisme américain et l'usage un peu trop facile de la force militaire par les Etats-Unis. Ils en sont partiellement responsables. L'Union Européenne a vu ses états membres réduire considérablement leur budget de la défense. De fait, les pays européens ont souvent dû faire appel à leur allié américain en cas de crise grave sur leur continent : guerre en ex-Yougoslavie, crise des missiles lors de la guerre froide, etc. Le comportement des Européens est très contradictoire : volonté d'indépendance politique, idée de défendre la paix dans le monde, envie d'être une alternative à la puissance américaine. Mais dans le même temps, ils ne se donnent pas les moyens militaires et diplomatiques de leurs actions et ils appellent au secours le grand frère américain certes un peu rustre mais très utile quand il faut user de la force !

Si les Européens veulent vraiment peser sur la scène internationale et s'ils veulent vraiment se confronter au monde extérieur, il faudra qu'ils se remettent en cause et acceptent d'augmenter les budgets des ministères de la défense, de s'organiser au niveau de la chaîne de commandement, de mieux coordonner leurs forces armées et, surtout, ils devront accepter que l'usage de la force est parfois inévitable. Un Français ou un Allemand peut-il accepter de combattre pour ses voisins Baltes ou autres ? Peut-il comprendre que l'usage de l'outil militaire est parfois nécessaire ? Ce sont questions auxquelles il faudra rapidement répondre si l'on veut construire une véritable défense européenne.

 

Hervé Tisserand.

La Puissance et la Faiblesse. Les États-Unis et l’Europe dans le nouvel ordre mondial de Robert Kagan, 2003. Editions Plon

The Wrong Lesson of Munich de Ian Buruma.

Une défense européenne essoufflée, par Laurent Zecchini, Le Monde du 01.10.08.

29 septembre 2008

Crise à New York, champagne à Tokyo

C’est bien connu :  « le malheur des uns fait le bonheur des autres ». C’est d’autant plus vrai dans le monde économique où les poissons les plus faibles ont toujours eu vocation à être dévoré tout cru par les requins  de la finance. La crise dite des subprime qui affecte nombre d’établissements financiers depuis plus d’un an ne déroge pas à la règle.

 

Avec un peu de cynisme, nous aurions pu parler de cet alibi fabuleux que fournit la crise au  Président Sarkozy qui peut ainsi justifier, ou plutôt cacher, l’échec complet de sa politique économique  (si tant est qu’il en ait une !) qui mène inexorablement le pays au bord du marasme alors que la France est paradoxalement un des pays les moins touché par la crise. Les banques françaises feront en effet cette année encore des bénéfices substantiels.

 

Plus que résister face à la tempête, certaines institutions financières ont en effet su profiter des déboires de leurs concurrentes  anglo-saxonnes pour s’accroître. Et à ce petit jeu, ce sont des holding japonaises qui semblent avoir remporté le gros lot.

 

Depuis une semaine on assiste ainsi à un nombre impressionnant d’acquisition et de rachat.

 

Le 22 septembre on apprenait que Nomura, une des principales maison de courtage du Japon rachetait l’ensemble des activités de Lehman’s Brother en Asie et en Océanie avec ses 3 000 employés pour 225 millions de dollar.

Deux jours plus tard, c’étaient les activités de Lehman’s Brother au Moyen-orient et en Europe (2 500 employés dans 20 bureaux) qui étaient rachetés pour… 2 dollar.

Kenichi Watanabe, l’un des dirigeants de Nomura qualifia ces acquisitions d’exceptionnelles car permettant à son groupe "d’étendre son empreinte sur l’Europe ainsi que sa portée internationale » concluant que c’est « une opportunité comme on en a une par génération ».

Dans la foulée le titre prenait 9,58% à la bourse de Tokyo.

 

Dans le même temps, on apprenait lundi 22 septembre que la Mitsubishi UFJ rachetait jusqu’à 20% des actions de la deuxième maison de courtage américaine Morgan Stanley pour plus de 8 milliard de dollar. Puis le 29 septembre elle acquérait 29,8% de UnionBanCal Corp avec l’ambition de faire de la principale banque californienne une de ses filiales.

Enfin la Mizuho quant à elle achetait pour 1,2 milliard de dollar  des actions émises par Merril Lynch en janvier et qui a dû fusionner avec la Bank of America  pour éviter la faillite. Cette acquisition de titre par les Japonais a été présenté comme un simple renforcement de lien entre les deux établissements. La banque nippone souhaitant profiter des dividendes et d’une éventuelle plus value lors de la revente des titres prévue en 2010.

 

Les institutions financières japonaises sont en bonne santé. Et si elles sont si puissantes, c’est principalement le résultat de la politique gouvernementale d’assainissement et de concentration qui eût lieu dans l’archipel de 2001 à 2006. C’est notamment grâce à cette politique qu’est née la Mitsubishi UFJ Bank, deuxième plus grosse banque en avoir avec 1 700 milliard de dollar, derrière Citigroup. Elle a été fondée en octobre 2005 de la fusion de la Bank of Tokyo Mitsubishi et de la UFJ Bank. Cette dernière étant elle-même le résultat du regroupement de trois banques  en 2002, les Sanwa Bank, Tokai Bank, et Toyo Trust and Banking.

 

Contrairement à ce que disent George W. Bush ou Nicolas Sarkozy, tout ne va donc pas si mal. C’est juste une question de latitude. C’est aussi et surtout une question de politique économique.

 

Barrak Obama, avec d’autres, l’a bien compris, lui qui n’a pas hésité à désigner la politique de dérégulation des marchés opérée pendant 8 ans par l’administration Bush comme responsable des maux actuels. De même qu’on peut voir dans l’offensive financière nippone le résultat de la politique de Junichiro Koizumi qui entre 2001 et 2006 a assaini de façon drastique le milieu bancaire japonais qui souffrait des mêmes maux que ceux des Etats-Unis.

 

Ainsi, pas plus que la crise financière américaine ou que la bonne santé des banques japonaises, la faible croissance française et la morosité de son économie ne sont des phénomènes sans causes. Ils sont le fruit d’une politique. Et les premiers responsables de ses résultats sont ceux qui ont conduit cette politique.

 

Alexandre Joly.

 

 

 

07 septembre 2008

Kazuya Ito, l’Afghanistan et l’engagement français

Kazuya Ito avait 31 ans et était japonais. Son corps a été retrouvé mercredi 27 août dans l’est de l’Afghanistan. Mort, criblé de balles. Son crime ? Avoir été agronome et travailler depuis 2003 pour une association japonaise, Peshawar Kai. Sa mission était d’aider les paysans afghans à faire pousser patates douces et riz en lieu et place du pavot, en organisant l’irrigation de terres arides. Et c’est en se rendant sur le site d'un projet d'irrigation, dans la province de Nangarhar qu’il a été enlevé le mardi 26, 24 heures avant son assassinat.

Ainsi,au moment où la France pleure 10 de ses soldats morts dans une embuscade et s’interroge sur sa présence dans un conflit à des milliers de kilomètres de la métropole, le Japon en fait de même autour de son travailleur humanitaire. Et ce alors qu’à Tokyo des négociations doivent s’engager entre le futur gouvernement * et l’opposition sur le renouvellement de la loi annuelle de déploiement de la force de soutien aux troupes terrestres en Afghanistan qui opère dans l’Océan Indien, et qu’à Paris l’Assemblée nationale en fera de même le 22 septembre.

Dans cette optique, le meurtre de Kazuya Ito a naturellement servi d’arguments au gouvernement nippon. Ainsi, Nobutaka Machimura, le Secrétaire du Chef de Cabinet et numéro 2 du gouvernement, lors de la conférence de presse annonçant la mort de l’humanitaire, estimait « que maintenant plus que jamais, le public japonais a senti l’importance de l’obligation d’être activement engagé dans la lutte contre le terrorisme à cause du sacrifice de précieuses vies ». Défendant la position japonaise depuis 2003.

Si l’instrumentalisation de la mort d’un travailleur humanitaire, comme de celles de 10 soldats, dans un débat portant sur un engagement militaire peut paraître malsaine, elle en est pour autant inévitable. D’autant plus inévitable qu’elle est ici symbolique de la nature du combat mené.

Kazuya Ito n’était le bras armé d’aucune puissance occupante, il était un humanitaire qui avait découvert la souffrance du peuple afghan et qui s’était depuis voué à l’aider. L’association pour laquelle il oeuvrait n’était l’instrument d’aucune politique gouvernementale, ni japonaise, ni américaine. Au contraire, ses fondateurs sont des proches du docteur Tetsu Nakamura qui depuis 1984 soigne les réfugiés aux confins du Pakistan et de l’Afghanistan et qui est connu pour s’être opposé à l’intervention américaine en 2001.

Comme l’écrivait le Yomiuri Shinbun dans son éditorial du 29 août, Kazuya Ito n’était porteur d’aucune idéologie de conquête, « travaillant dur, s’intégrant à la communauté locale, ayant construit de fortes relations de confiance avec la population ». Mais comme pour les 25 autres travailleurs humanitaires tués depuis le début de l’année, ces valeurs représentaient une menace pour les Talibans. Le développement de l’Afghanistan n’ayant jamais fait parti de leur projet politique.

Alors que faire ?

Au Japon dans le parti au pouvoir, comme aux Etats-Unis chez les Républicains ou en France dans la bouche de nombreux députés de l’UMP, le maître mot est depuis 2001 : « Guerre contre le Terrorisme ». Idéologie qui est le degré zéro de la géopolitique, confondant la méthode et l’objectif, pratiquant l’amalgame et l’approximation. Idéologie d’autant plus dangereuse qu’elle se rend incapable d’identifier clairement l’ennemi qu’elle disperse les moyens et rend toute stratégie efficace impossible. Il est donc inquiétant de voir cette expression resurgir sous la plume du ministre de la Défense.

Qui plus est une telle définition ne peut justifier le déploiement dans un pays d’une coalition de 40 pays, 75 000 hommes, d’une aviation et de plusieurs groupes aéronavals. Tout le monde sait que le contre terrorisme est affaire de renseignement et de subtilité. Mais doit-on, peut-on, pour autant rester passif et laisser l'Afghanistan à son propre sort ?

Les arguments des partisans d'un retrait de toutes les forces "alliées" sont connus : guerre pour les intérêts de l'Oncle Sam (oubliant en cela la légalité et le soutien des Nations Unis à ce conflit), guerre d'occupation contre les Afghans (omettant leur expression démocratique et le fait que de nombreux Talibans soient étrangers), bourbier et donc guerre impossible à gagner....

Non, car cette guerre est en fait, sommes toutes assez classique. Elle se fait contre une entité politico-militaire claire (les Talibans, soutenus sporadiquement par quelques nationalistes et chef de guerre pashtounes), leur idéologie (une conception nihiliste du Jihad) dans un cadre géographique restreint. Or les Talibans et leur idéologie portés au pouvoir ont montré de 1996 à 2001 leur dangerosité pour la stabilité de la région et au-delà pour l’Afrique, l’Asie centrale, jusqu’à New-York. Un retour des Talibans, c’est l’assurance d’un embrasement des pays voisins (dont la Chine avec le Xinjiang et le Pakistan nouvellement démocratique, deux puissances nucléaires), mais aussi d’une relance des réseaux jihadistes en Europe ou leur renforcement en Afrique. Alors, si nous n’appuyons pas les propos présidentiels quand il dit à Kaboul le 20 août « que ici se joue une partie de la liberté du monde » on admettra que le monde vivra beaucoup plus en sécurité avec un Afghanistan sans Taliban.

Argument qu’il est aujourd’hui difficile de contredire pour les partisans européens comme japonais d’un retrait des troupes. Opposé à la mission japonaise dans l’Océan Indien, le Asahi Shinbun s’est retrouvé embarrassé dans son éditorial du 29 août, se contentant de réclamer « un retrait temporaire de tous les personnels des régions instables » ajoutant que le Japon devait « comme nation, surmonter son chagrin et continuer à être actif. » sans appeler, ni à la reconduite, ni à l’annulation de la mission japonaise, une première. Car la position devient intenable pour les partisans, au Japon comme en France, d’un retrait au soutien militaire.

Contester la présence militaire étrangère, c’est vouloir laisser les Talibans reprendre le pouvoir à Kaboul, avec le cortège d’horreurs qu’on a déjà connu comme l’ont rappelé B. Kouchner et H. Morin dans leur tribune paru dans Le Monde du 29 août. De 1996 à 2001, «la dignité de la femme y était bafouée, les droits de l'homme inexistants, l'obscurantisme et la terreur omniprésents. Sous ce régime, les femmes n'étaient ni scolarisées ni soignées, les opposants étaient pendus dans les stades, la culture et la civilisation du pays reniées. ».

Cette guerre, elle est donc menée à la fois pour éviter un accroissement de l’instabilité mondial, mais aussi et surtout au nom d’une certaine idée du genre humain.

C’est pour cela que si avec François Bayrou nous pensons que la stratégie engagée, axée sur un effort tant militaire qu’économique, social et politique est bonne, si nous soutenons l’engagement français et pensons qu’il doit être consolidé et renforcé, nous estimons qu’il nous faut aussi, en tant que démocrates, exiger l’exemplarité dans la façon de mener cette guerre. L’exemplarité c’est pour le gouvernement et l’Etat Major s’imposer une plus grande transparence dans la gestion stratégique et tactique du conflit, accepter la critique, rendre des comptes. C’est aussi pour la diplomatie française négocier, avec l’aide des autres Européens, notre plus forte présence sur le terrain en exigeant des Américains que cessent les bombardements hasardeux de villages, la mort de civils, les emprisonnements arbitraires, l’impunité face aux détournements des aides qui in fine affaiblissent la légitimité de l’intervention et sont totalement contre productif puisque façonnent les adversaires de demain.

Alexandre Joly.

* Le cabinet Fukuda a démissionné le premier septembre mais il gère les affaires courantes en l'attente de l'élection d'un nouveau président à la tête du parti majoritaire prévu à la fin du mois. L'élu deviendra alors le nouveau chef du gouvernement.