Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

04 juin 2008

Mariage annulé de Lille : la République des aboyeurs

C'était trop beau ! Je m'apprêtais à saluer le courage et la fermeté de la Garde des Sceaux devant l'hystérie collective quand, ce mardi 3 juin, un communiqué du ministère de la Justice a annoncé que Rachida Dati « souhaite que la juridiction collégiale d'appel puisse être amené à se prononcer à nouveau». Autrement dit, faire appel de la décision du tribunal de Lille qui avait accepté la demande d'annulation du fameux mariage.

Cette volte face de Rachida Dati ne surprend malheureusement pas, tant était forte la pression médiatique et faible et sans constance est ce gouvernement ! Ainsi, une fois de plus dans notre pays le Droit et la Justice sont baffoués par l'Etat qui de plus s'immisce dans la vie d'un couple. Or la négation de l'état de droit et une volonté d'imprimer son emprise sur la vie privé contre la volonté des intéressés sont deux des mamelles d'un état totalitaire.

Mais revenons sur l'affaire.

S'exprimer sur un jugement rendu comme celui du mariage annulé de Lille est toujours mal aisé, car réclamant une maitrise de tous les paramètres du dossier que seul le juge et les parties en présence connaissent. Or ces derniers jours, 3 voies sont complètement étouffées : celle du juge, et surtout celles des deux principaux intéressés, à savoir les ex-époux.

Enfin, à cela s'ajoute le malaise lié au fait que des politiques, des militants associatifs ou des polémistes s'immiscent sans la moindre pudeur dans une affaire d'ordre privée sans le moindre respect pour les personnes concernées. C'est pourquoi dans cette polémique ce qui est de l'ordre du privé (la liberté de conscience, les attentes et les engagements personnels) a trop rapidement était amalgamé à ce qui tenait de la loi, avec pour résultat de carricaturer notre Droit et de sombrer dans le ridicule.

Volontairement ? On peut le penser. Car ce débat oppose deux tendances laiques et deux visions de notre démocratie. Les « progressistes » et les « libéraux ». Les premiers veulent faire un monde ou les libertés seraient imposées, les seconds un monde où elles seraient garanties. Dans le premier cas on impose les choix moraux et privés, dans le second ils sont laissés à la discrétion des particuliers.

Historiquement, les pays dans lequel le premier camp a pris le dessus ont rapidement tourné à la dictature. Seul le second garantit un avenir libre.

Chacun est en effet libre d'avoir le point de vue qu'il souhaite sur l'exigence de virginité avant le mariage. On peut trouver cela machiste, indispensable, réactionnaire, bien, moyen-âgeux, romantique, complètement tarte, irréaliste.... toutes ces opinions sont de l'ordre de la conscience personnelle et doivent donc être, sinon respectés, avoir au moins libre cours. Sauf à vouloir un état qui dicte les consciences. Et si la loi dans une démocratie laique et libérale n'a pas à imposer le principe religieux de la nécessité de virginité, il n'a pas non plus à condamner le fait que certains souhaitent se l'imposer comme principe de vie.

C'est ainsi que balayant toutes précautions de langages, nombreux sont ceux qui dans ce landerneau médiatico-politico-associatif se sont engagés dans une course au propos le plus délirant et le plus choquant n'hésitant pas à faire dans l'approximation, le mélange des genres ou la contre-vérité pour faire parler d'eux. Mais pour dire quoi ?

Fadela Amara, à l'unission des associations féminines et de personnalités de gauche, devant la presse le 30 mai à Evry affirmait que l'annulation du mariage est « une vraie régression, un camouflet pour la liberté des femmes et même pour notre pays » . S. Royal enchaînait dans le JDD du 1er Juin estimant que c'était « une régression du droit et de la dignité des femmes » . Ajoutant que la juge « avait toutes les bases juridiques pour ne pas annuler le mariage ».

Propos surprenants. Pourquoi cette condamnation morale de l'acceptation de demande d'annulation d'un mariage ? Le progrès que prétendent défendre tous ces gens, résiderait-il donc dans l'obligation faite à ce couple qui ne souhaite pas vivre en commun de le faire ? Jusqu'à aujourd'hui il me semblait que les avancées en matière conjugale visaient justement à promouvoir la liberté de rompre les liens du mariage par l'annulation ou par le divorce, pas l'inverse.

A écouter et lire tout ces commentaires, on a l'impression, et certains ont même osé le terme comme SOS racisme ou Patrick Devedjian, que la justice a « intégré la pratique de la répudiation dans le droit positif » (communiqué UMP du 30 mai), avant que ce dernier ne mette un peu d'eau dans son vin, se rappelant sa formation juridique. Car par répudiation, pratique infiniment condamnable, on entend que le mari se sépare de sa femme au motif qu'elle ne serait plus vierge, contre (et c'est là le plus important) la volonté de celle-ci. L'avis et le choix de l'épouse dans la répudiation n'est pas pris en compte.

Dire cela est doublement scandaleux et injurieux pour le droit français, car c'est en premier lieu faire croire que devant les juges et dans les tribunaux français les femmes ont moins de droit que les hommes, ce qui évidemment mensonger et c'est ensuite omettre l'essentiel de l'affaire, à savoir que la décision d'annuler le mariage est une décision commune et volontaire des deux époux. Ce qui est l'opposé de la répudiation dans laquelle la femme n'a pas son mot à dire. Condamner cette décision de justice, c'est alors avant toute chose condamner le libre choix des époux et surtout celui de la femme de ne pas être contrainte de vivre avec un mari qui ne le souhaite pas non plus.

Ici, le magistrat n'a ni interdit, ni fait passer les délires de l'un avant les désirs de l'autre, il a enterriné la volonté commune des deux époux de se séparer et de faire annuler le contrat : il n'a donc pas contraint, il a libéré !

L'article 180 du code civil sur lequel est basé la décision est par ailleurs avant tout un texte qui vise à empêcher les mariages forcés ou tronqués pour défendre la liberté de choix, comme l'a exprimé un peu maladroitement Rachida Dati : "La justice est là pour protéger. Le fait d'annuler un mariage est aussi un moyen de protéger la personne qui souhaite peut-être se défaire du mariage, parce que je pense que cette jeune fille (...) a souhaité également, sans doute, se séparer assez rapidement".

Dire le contraire de ce texte et vouloir le modifier comme le propose Dominique Paillé, conseiller politique de Nicolas Sarkozy dans un entretien à Le Point.fr, c'est défendre la vision la plus conservatrice et la plus traditionnaliste du mariage. En effet, où est le progrès à dire comme lui qu' «  il faut supprimer toute cause d'annulation d'un mariage » . Car rappelons que cet article de loi entend empêcher les cas de mariage forcé ou tronqué en affirmant que « l'exercice d'une contrainte sur les époux ou l'un d'eux, y compris par crainte révérencielle envers un ascendant, constitue un cas de nullité du mariage. ». Vouloir rayer cette disposition ce n'est pas une avancée mais un bien grand bon en arrière !

Car dans cette affaire, le fond du jugement a été plus ou moins volontairement omis et détourné. Sur son blog, le juge Jean-Pierre Rosenczveig  explique bien que « la question posée aux juges lillois n’était pas celle de la virginité au mariage ou celle de la chasteté avant la mariage, mais celle de savoir, pour annuler un mariage, si la mariée avait trompé son époux sur un élément essentiel. Le mari l’affirme, la jeune femme l’admet.».

Le fond de l'affaire, ce n'est donc pas l'hymen de la jeune femme, c'est la confiance rompue entre les deux époux. Et comme le signalait Hervé Mariton (UMP), qui a condamné mardi 3 Juin la décision de faire appel, « beaucoup de gens considérent qu'on ne peut pas baser un mariage sur un mensonge ». L'article 180 aussi, surtout quand celui-ci est reconnu et considéré capital par les deux époux, comme dans le cas présent

Mais cette nuance pourtant capitale, les détracteurs de cette décision ont refusé de la voir. Soit par un sincére aveuglement idéologique ou émotionnelle devant une idée (la virginité avant le mariage) qui apparaît à certains milieux parfaitement rétrogrades, soit par calcul politique, pour jouer sur la peur de l'Islam, tendance malheureusement trop présente dans notre société et en particulier dans les médias, ou tout simplement pour le plaisir d'aboyer avec la meute.

Espérons alors que le prochain jugment, s'il a lieu, confirmera en appel le premier verdict et qu'aucune proposition de lois à la va-vite ne viendra modifier l'artcile 180. Il en va en effet de la crédibilité d'une justice bien trop souvent malmenée dans notre pays et qui ne doit être l'otage, ni de la pression médiatique, ni de la manie, qui agite les bancs de l'Assemblée Nationale, « de légiférer dès qu'il y a un fait divers ». « Très mauvaise habitude française depuis longtemps » comme l'affirmait à Radio J, dimanche, Patrick Devedjian, qui avait décidément mis énormément d'eau dans son vin en 3 jours.

Rappelons enfin un principe qui devrait et aurait dû primer : celui de prendre en compte la volonté des deux parties de se séparer. Car aujourd'hui, suivant les propos de François Bayrou sur LCI, nous avons avant tout une pensée pour le droit à la liberté de choisir de cette jeune femme « qui est elle même demanderesse (sic) de cette dissolution pour que tout cela soit derrière elle ». Ce dont malheureusement nombre de ses défenseurs autoproclamés se soucient peu.

Alexandre Joly.

14 avril 2008

Abandon de souveraineté

« Par principe, c'est à la police  (du pays hôte) d'assurer la sécurité. C'est notre rôle de protéger le relais de la flamme et pas celui des Chinois. Il n' y aura pas de policiers chinois ». Voilà des propos qu'on aurait aimé voir être mis en pratique lundi 07 avril lorsque la flamme olympique a traversé Paris. Une telle idée, pourtant évidente pour quiconque le mot  « souveraineté » à un sens, n'ont malheureusement pas traversé les esprits de nos dirigeants dont aucun n'est l'auteur de ces propos. En effet, ils ont été prononcé par Shinya Izumi, le Directeur de la Commission Nationale de la Sécurité Publique japonaise, le grand patron de la police ce vendredi 11 avril.

Car, assurément, le fiasco du relais organisé pour le passage de la flamme dans Paris n'aurait pas pris cette tournure si les autorités françaises avaient assumé pleinement leur responsabilité première. Nous n'aurions, peut-être pas été les témoins d'abus dignes de la police chinoise, commis par la police française, tel que le matraquage ou l'interdiction de filmer faite à des cameramen de France 2 et des photographes de presse, ou le violentage de manifestants pro-tibétains qui n'entravaient en rien le bon déroulement de la cérémonie.

Tout aussi navrant était le spectacle du directeur du cabinet du Préfet de Police de Paris recevant des ordres de la part d'un conseiller de l'ambassade de Chine, M. Song, qui ordonnait le non-passage de la flamme devant l'Hôtel de Ville et modifiait le déroulement du parcours, sans aucune consultation ou demande d'accord des autorités françaises. Décisions prises en secret, règne de l'arbitraire, usage inconsidéré de la violence, tant de caractéristiques propres aux dictatures, voilà ce que nous retiendrons de cette journée. Journée qui devait être, rappelons-le, celle des valeurs de l'olympisme.

Pierre Mure, Directeur de l'Ordre Public et de la Circulation à Paris, et Michèle Alliot-Marie, Ministre de l'Intérieur ont ainsi beau jeu de condamner les cafouillages de l'organisation chinoise, on est en droit de se demander pourquoi et qui a « délégué » des pouvoirs de sécurité publiques sur le sol français à ces fameux organisateurs chinois ? Qui a autorisé un tel abandon de souveraineté ? Comment a-t-on pu laisser une trentaine de ces fameux « Wujing », force paramilitaire en survêtement, assurer de façon quasi autonome une partie de la sécurité de la flamme dans les rues de la capitale, parasitant le travail des forces de l'ordre française ?

M.A.M a beau expliqué dans une interview diffusée le 09 avril dans le 20 heures de France 2 qu' « aucune consigne de retirer les drapeaux, de les prendre aux manifestants » n'avait été donné, plusieurs dizaines de policiers en différents endroits du parcours l'ont fait. Et il y a peu de chance que ce fût de leur propre initiative. Si quand bien même ce fût le cas, comme certainement lors du matraquage de journalistes, on peut se demander si la modification de la chaîne de commandement liée à l'ingérence chinoise n'est pas étrangère à ces comportements. Et on en revient donc au rôle, ou à l'abandon d'une partie de ses prérogatives, des autorités.

Afin de calmer les quelques critiques émises contre les interventions déplacées et agissements violents d'une partie des policiers en charge de la sécurisation du parcours de la flamme, la Ministre de l'Intérieur a « demandé qu'il y ait une enquête administrative pour savoir dans quelles conditions il y avait eu ces retraits de drapeaux et pourquoi ». Autant dire que seuls deux ou trois lampions vont se retrouver blâmer et que cela restera sans suite. En attendant qu'une réelle mais hypothétique opposition démocratique et parlementaire ne fasse son travail en questionnant et enquêtant sur le rôle du gouvernement.

Alexandre Joly.

01 avril 2008

Mensonge, mépris et autocratie

Ce mardi 12 mars va se jouer à l'Assemblée Nationale une pièce tragi-comique comme seule la cinquième République peut en scénariser : François Fillon, chef du gouvernement, viendra exposer aux parlementaires les modalités de l'envoi de nouvelles troupes françaises en Afghanistan.
La guerre en Afghanistan posant le contexte tragique, la lecture du premier ministre celle du comique.

« Qu'y a-t-il donc de si hilarant à ce qu'un dirigeant s'adresse aux représentants du peuple ? » me demanderez-vous ? Rien à priori, si ce n'est dans ce cas un magnifique triple effet comique de situation. Autrement dit une forme d'humour basée sur les paradoxes, décalages, volontaires ou non, entre la situation présentée et celle que l'on était logiquement en droit d'attendre.

Tout d'abord le lieu : l'Assemblée Nationale est le lieu où se réunissent les députés pour débattre et voter des lois. C'est sa raison d'être dans une démocratie. Or ici, nul débat et surtout nul vote n'est proposé en fin de séance sur ce qui pourtant ressemble fort à une décision politique majeure. Les députés vont se retrouver dans la posture de simples auditeurs et spectateurs d'un fait princier, d'une décision de gouvernance qui leur aura complètement échappée. Ce n'est pas la première fois dans la cinquième République, certes, c'est même constitutionnel, mais le fait est que la France est la seule « démocratie » où le Parlement n'a pas son mot à dire sur une guerre que mène le pays.
Comme l'a dit H. Emmanuelli lors de questions au gouvernement ce 26 mars : « La France est la seule démocratie occidentale où une guerre peut perdurer sans que le Parlement ne l'autorise  ou ne soit informer».

Il y a 2 000 ans, sous le Principat d'Auguste, qui n'était pourtant pas un modèle démocratique, le Sénat romain votait et entérinait encore les déclarations de guerre décidées par ce dernier. En France, en 2008, ce n'est même plus le cas.

Deuxième point comique : l'acteur principal. Mais qui est-ce, Nicolas Sarkozy ou François Fillon ? On sait que cette décision politique est une volonté présidentielle, un geste qui se veut fort pour marquer la détermination de Nicolas Sarkozy à rapprocher la France de l'OTAN et des Etats-Unis. Mais qui défend ce choix ? Le premier ministre. Situation surprenante et burlesque d'un Prince incapable de faire un plaidoyer de sa politique et qui envoie en représentation son premier ministre, lui même simple exécutant. Certes, dans les institutions le Président de la République n'a pas le droit de se présenter devant le Parlement (situation qu'avait promis de modifier Nicolas Sarkozy lors de sa campagne électorale, cette autre grand spectacle comique, et dont on attend la réforme) mais quel affront et mépris portés à la face des représentants du peuple que de les obliger à suivre la lecture par celui qui n'en est pas l'instigateur d'une décision à laquelle ils ne participeront pas !

Enfin le fond : l'envoi de troupes supplémentaires sur un théâtre de guerre. Combien de scènes de cinéma, de théâtre sont basées sur l'opposition entre le propos et l'action ? Entre ce qu'un personnage dit, promet de faire ou avoir fait et ce qu'il fait ou a réellement fait ? En un mot sur le mensonge ? Autant qu'il existe de films et de pièces comiques. Alors pourquoi ne pas rire aussi de cette déclaration de Nicolas Sarkozy durant la campagne électorale de 2007 qui prend toute sa saveur aujourd'hui ?
Dans une interview sur France 2, face à Arlette Chabot qui le questionnait sur le premier retrait des troupes spéciales opéré alors par Jacques Chirac il expliqua : « c'est une politique que je poursuivrai » la justifiant parce que « la présence des troupes françaises à cet endroit du monde ne me semble pas décisive ». Promesse de retrait mais décision d'envoyer de troupes. C'était la boutade finale. Eclats de rire. Rideau !

La Cinquième République a toujours porté en elle les risques d'une dérive autocratique. Le mensonge comme le mépris à l'encontre du peuple et de ses représentants ne sont que les conséquences naturelles et humaines de cette dérive. Et la parodie de démocratie qui va se jouer à l'Assemblée Nationale cette après-midi n'en est qu'une énième illustration. Malheureusement nous ne sommes pas dans un film et des soldats, des civils paieront de leur vie cette décision prise sans l'accord des citoyens de ce pays. 
Il est tant que les Français prennent conscience que leur rejet progressif de la politique vient de la structure même d' institutions qui ne favorisent pas l'émergence d'une gouvernance respectueuse, morale, démocratique et où les mots justice, égalité et liberté auraient le même sens que celui qu'ils entendent.

Alexandre Joly.

Extrait de l'interview : http://www.dailymotion.com/video/x4u47q_nicolas-sarkozy-e...

 

21 mars 2008

Affaire du SMS : un bien malheureux épilogue

           On savait depuis bien longtemps Nicolas Sarkozy maître dans l’art du contre-pied. Le point final surprise (mais le sera-ce vraiment ?) annoncé par Carla Bruni-Sarkozy dans une tribune au journal Le Monde, de l’affaire de l’article du SMS en est la dernière illustration.

            Rappel des faits : le 06 février 2008, dans un article publié par Le Nouvel Obs.com, intitulé « L’obsession de Cécilia », le journaliste Airy Routier prétendait que le président avait envoyé, une semaine avant son mariage avec Carla Bruni, un SMS à son ex-épouse, Cécilia, dans lequel il aurait écrit ces mots : « Si tu reviens, j’annule tout ! ».

            Le 07 février, une plainte était alors déposée au Parquet de Paris contre Le Nouvel Obs.com, par Maître Thierry Herzog, l’avocat de Nicolas Sarkozy, pour faux, usage de faux et recel. De tels délits étant punissable de 45 000 euros d’amende et 3 ans d’emprisonnement. Le chef de l’état démentaient donc l’existence de ce SMS par la voie judiciaire. S’en suivit une polémique entre proches de Nicolas Sarkozy, comme Rama Yade, pourtant Secrétaire d’état aux droits de l’homme, traitant de « charognards » ceux qui voulaient « la peau de Nicolas Sarkozy » et ceux, défenseurs des droits des journalistes qui voyaient dans ce geste une volonté présidentielle de faire pression sur  les médias.

            L’enquête était donc toujours en cours pour déterminer les faits, lorsque dans son édition du 19 mars, Le Monde publiait la tribune de Madame Bruni-Sarkozy intitulée « Halte à la calomnie ! » dans laquelle elle annonçait que Nicolas Sarkozy retirait sa plainte contre  le journal, et l’accompagnait d’une leçon de moral aux journalistes. Fin de la plainte, fin de l’enquête, fin de la polémique.

            « Beaucoup de bruits pour rien » aurait écrit Shakespeare, « le résumé d’un an de gouvernance » écrirait l’analyste politique. «Sur»-réaction, contradictions, intimidation, rétractation, telles sont les attitudes adoptées par la présidence dans cette affaire sommes toutes mineure, comme malheureusement dans d’autres plus graves, et qui démontrent une fébrilité certaine quant à l’exercice du pouvoir.

            Sur le fond de l’affaire, que les choses soient claires on se fiche éperdument de savoir si Nicolas Sarkozy a relancé Cécilia une semaine avant son mariage avec Carla. La vie à l’Elyséee n’a pas à devenir un sitcom qui concurrencerait « Desperate Housewives », et Cécilia n’a pas pour vocation à être une nouvelle Teri Hatcher. A ce titre, le fond de l’article de nous intéresse pas. Et la réaction de Nicolas Sarkozy à celui-ci semblait d’autant plus disproportionné.

            Alors, la fin des poursuites pour apaiser les esprits ? Pas si simple. Dans son article la femme du président laisse sous-entendre un geste de magnificence de la part de son mari faisant suite à une lettre d’excuse du journaliste. Hauteur d’âme présidentielle retrouvée dans un entre deux tours d’élections municipales défavorables diront les sceptiques.

             Mais quid alors de la réaction première du président ? Réaction qui suscita une réelle interrogation et le fond de la polémique tant elle fût surprenante et disproportionnée. En attaquant très fort le journal, Nicolas Sarkozy a voulu faire éclater devant les tribunaux la vérité, ou plutôt le mensonge, de l’article. Faisant passer le message suivant : au-delà de son cas personnel, les journalistes sont tenus de dire la vérité rien que la vérité, et doivent pouvoir le prouver. La liberté d’expression et le secret des sources contre la vie privée et l’honneur d’un homme : éternel débat de nos démocraties.

             Débat qui avait été mis en sourdine, du moins le pensait-on, en ce qui concernait les présidents de la république. Personnage illustre, au-dessus du peuple, dans la cinquième république, la vie privée de celui-ci n’était pas thème à articles et surtout le président, bénéficiant de l’immunité judiciaire, s’abstenait d’utiliser la justice pour régler des litiges personnels contre de simples justiciables au risque sinon de mettre en évidence cette suprême et injuste inégalité devant la loi.

            Mais ce n’est que la coutume, et Nicolas Sarkozy n’en a cure. Le droit lui accorde la possibilité d’attaquer, il la saisit. En portant plainte au Pénal, il oblige le journaliste à divulguer ses sources rentrant alors en complète contradiction, une fois n’est pas coutume, avec ces propres propos tenus lors de ses vœux  à la presse le 08 janvier 2008 : « Un journaliste digne de ce nom ne donne pas ses sources. » . Répondant à une question de la présidente de l’Association de la presse présidentielle, il acquiesçait à l’idée de « prendre une décision forte pour le respect de la protection des sources, l’un des piliers de la liberté de la presse ». On voit quelle décision ! Agissant donc à l’encontre de ce qu’il reconnaissait lui-même comme des principes élémentaires et fondamentaux de la liberté d’expression, pilier de la démocratie.

            Dans cette optique, la véracité de l’existence ou non du  SMS prend alors toute son ampleur. Le président souhaite-t-il sanctionner un organe de presse pour avoir délibérément menti et l’avoir calomnié dans le cas où le SMS n’existerait pas ? Ou sommes-nous en présence, dans l’hypothèse où le SMS est réel, d’un abus de pouvoir caractérisé et d’une atteinte délibérée au droit à l’information ?

             Réponse cruciale. Car dans le premier cas, le journal devra être condamné pour les délits reprochés. Dans le second, ce sera au président de rendre des comptes.

             Mais voilà, cette réponse nous ne l’aurons pas. La justice n’aura pas à trancher, car le président plaignant a, une fois de plus, changé d’avis en retirant sa plainte. Volte-face malheureuse qui laisse les citoyens sans réponse, et d’autant plus dubitatifs que les arguments avancés pour justifier ce retrait (une lettre d’excuse d’ Aury Routier, que Madame Bruni-Sarkozy, dit avoir reçu, sous-entendant un aveu de culpabilité du journaliste) sont peu explicites voir incompréhensibles : le journaliste continuant  même à affirmer que son article repose sur des faits avérés, maintenant l'existence du SMS. Et aux Français de continuer à se demander s’ils ont été les témoins d’une tentative de calomnie, ou d’un abus de pouvoir caractérisé.

Alexandre Joly.

05:56 Publié dans Actu France | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : sarkozy, sms, presse

03 janvier 2008

F. Bayrou au grand rendez-vous europe1 tv5monde



 
Hervé Tisserand 

11 décembre 2007

Affaires étrangères... aux promesses

Rarement visite officielle d'un chef d'état étranger n'a suscité autant de polémiques que celle que va faire en France le Guide de la Jamahariya libyenne, le Colonel Khadafi durant ces 6 prochains jours. Politiques, humanitaires et intellectuels s'opposent tant sur les motivations et conséquences de la venue du Guide en raison de son passé que sur le degré diplomatique qui lui est conféré.

La problématique libyenne a été bien posée par Claude Guéant, Secrétaire général de l'Elysée au JT de France 2 du 10 décembre : « Que devons-nous faire à l'égart de pays qui se sont mal comportés ? Est-ce que nous devons les laisser s'enfoncer (...) ou est-ce que nous devons les aider à se soustraire à ses activités que nous condamnons ?». Question kafkaïenne dont la réponse ne peut être donnée qu'après une analyse au cas par cas de l'évolution des dits pays. Alors quelles raisons valables Nicolas Sarkozy a-t-il pu trouvé à la Libye pour en faire un pays sur la voie de la rédemption ?

Ces raisons ont été bien résumées par Pierre Lellouch, spécialiste de politique étrangère à l'UMP en 3 points. Elles sont tout à fait valables car marquées du sens de la responsabilité, de la raison et du réalisme. : “Un, le pays a arrété son programme nucléaire militaire. Deux, il coopère complétement avec les services occidentaux sur la lutte contre le terrorisme. Trois, il s'ouvre au développement international. ».

Quant au contentieux sanglant entre les deux pays, Guillaume Denoix de Saint-Marc (Président du Collectif des familles des victimes du DC 10 d'UTA) a estimé qu'il fallait le dépasser car “c'est important si on ne veut pas que la Libye soit tentée de retourner vers ses vieux démons. »

Si le deuxième point peut prêter à contestation ce n'est pas tant à cause du point de vue du dirigeant libyen sur le terrorisme qu'il qualifiait dimanche d' « arme des faibles », que sur celui des responsables occidentaux qui manipulent le terme en dépit du bon sens (mais cela est l'objet d'un autre débat ). On pourrait aussi rajouter un quatrième point : la Libye est un client potentiel et fortuné pour l'industrie Française. Et aussi un cinquième plus personnel pour Nicolas Sarkozy, le Colonel est un des rares dirigeants à tendre une oreille attentive au projet d'Union Méditerranéenne du Président.

Donc, s'il est effectivement bienvenue de marquer symboliquement le retour de la Libye à des relations pacifiées avec le reste du monde par l'accueil de son chef d'état, la manière quant à elle peut susciter des reserves. Pas seulement à cause de la date choisie, comme l'a dit Rama Yade au journal Le Parisien, « parce qu'elle coïncide avec la Journée mondiale des droits de l'homme. Le choix de cette date est un symbole fort, je dirais même scandaleusement fort. » Mais parce qu'il existe en matière de protocole diplomatique des nuances qui servent à distinguer un pays sur le retour de ceux qui sont nos alliés et amis.

Et c'est bien cette absence de nuance, marque de fabrique de Nicolas Sarkozy, qui pose problème. Car si le Président est comme il l'a déclaré publiquement à Bruxelles ce week-end « heureux de recevoir » le colonel Kadhafi, on n'ose imaginer dans quel état d'excitation il doit se trouver au moment de rencontrer nos plus proches partenaires et ses homologues que sont Romano Prodi, Angela Merkel ou encore Jose Luis Zapatero... Pour reprendre l'expression de Jamel Debouz lors de la réception de son César en 2006, cela doit être « le 14 juillet dans son slip ».

Ce manque de retenu a été très bien résumé par Arnaud Montebourg ce lundi lorqu'il a dit : « Que des relations se rétablissent avec la Libye, oui. De là, à lui offrir les Champs Elysées et une centrale nucléaire et des armes de très hautes capacités... » il y a des étapes qui sont franchies beaucoup trop attivement.

Mais le cas libyen s'inscrit aussi et surtout dans une diplomatie sarkozyenne qui est aux antipodes des déclarations faites durant la campagne présidentielle. Déclarations que nous avons ici même réguliérement dénoncées tant elles étaient teintées d'  « irrealpolitik » pour reprendre le concept d'Hubert Védrine. Elles nous apparaissaient alors comme la preuve flagrante d'un manque de compétence, de vision et de lucidité en matière de politique étrangère du candidat-président.

Ce grand écart, nombreux sont ceux comme Bernard Henri-Lévy à le dénoncer : « Voilà un président qui s'applique avec beaucoup d'honêteté à nous dire que sur tous les terrains ce qu'il a promis il le fera... il y a un domaine où il ne tient pas parole c'est sur ces affaires des droits de l'Homme et ces affaires étrangères. » ( JT de France 2 du 08 décembre). Et de rappeler que Nicolas Sarkozy « a quand même été le seul avec le président Ahmadinejad à téléphoner à Vladimir Poutine pour le féliciter du résultat des élections. » Elections rappelons-le des plus truquées, et précédées d'une campagne électorale qui s'est résumée pour l'opposition privée d'expression à une série d'arrestations et de bastonnades policières...

On est donc loin, très loin, du discours du 28 février 2007 sur la politique étrangère du candidat Sarkozy qui voulait « une approche plus doctrinale des affaires internationales ». Cette approche avait notament pour socle son « deuxième grand objectif : promouvoir les libertés et les droits de l'homme sur la scène internationale ». Il dénonçait « les adeptes de la realpolitik (qui) ne sont pas si réalistes que cela » et ceux qui font « le sacrifice des valeurs au nom d'intérêts à court terme ».

Mais n'est-ce pas exactement ce qu'il fait aujourd'hui avec la Libye, la Russie mais surtout la Chine avec lesquelles il favorise l'intérêt commercial à court terme au détriment des enjeux démocratiques et stratégiques ? Les images navrantes lors du dernier sommet du G8 où Nicoals Sarkozy tendait son téléphone portable à Vladimir Poutine et le prenait à part pour « copiner » étaient à milles lieux de ses déclarations de février 2007 dans lesquelles il dénonçait « notre silence face aux 200 000 morts et 400 000 réfugiés des guerres de Tchétchénie » et trouvait « préoccupante » « l'évolution de la Russie ces derniers temps ». Mais à priori pas suffisament préoccupante pour s'aligner sur la politique plus réaliste et surtout plus critique d'Angela Merkel vis à vis de la Russie.

Parce qu'avec les relations internationales il oeuvre dans un domaine qu'il ne maîtrise pas et qu'il ne connaît pas contrairement à la chancelière allemande, un domaine où le plus patient et le plus fin est celui qui remporte la mise, un domaine dont la gestion du temps et de l'espace sont à l'inverse de son univers médiatico-politique, Nicolas Sarkozy passe d'un extrême à l'autre, de l'  « irrealpolitik » au cynisme kissingerien, sans politique claire et définie, sans stratégie pour l'avenir, et cela au détriment des intétêts à long terme de la France. Et avec des risques évidents pour l'avenir sachant qu'il n'a par la constitution, en matière de politique étrangère de comptes à rendre à personne. Omettant là aussi, sa promesse électorale de faire de la de politique étrangère de la France, « le résultat d'un débat démocratique » et de la sortir du «seul secret des chancelleries et des cabinets. »  

Alexandre Joly.

27 novembre 2007

Cavada et loyauté

« J’ai épuisé tous les recours de la loyauté ». C'est par cette phrase que J.M. Cavada, dans Le Figaro du 25 novembre, entend expliquer et justifier son choix de conduire la liste UMP aux prochaines élections municipales dans le 12 ème arrondissement de Paris.

Desertion peu surprenante, qui est la dernière en date d'une série qui a vu des « têtes d'affiche» du Modem le quitter pour aller rejoindre (bizarrement essentiellement) les rangs d' un UMP triomphant et dominateur.

Comment alors, ce qui sous toutes les lattitudes du monde s'appelle une trahison peut-elle être justifiée ? A qui et à quoi J.M. Cavada a-t-il donc été si « loyal » ?

Au Modem ? Non. En passant sous la bagnère de l'UMP il trahit de facto le Modem qui refuse tout accord avec le parti présidentiel. A noter d'ailleur que s'il a défendu les couleurs de l'UDF jusqu'à présent, il n'en a jamais été adhérent.

A François Bayrou ? Certainement pas. Sa défection s'est accompagnée de commentaires peu sympathiques puisque celui-ci est accusé d' « indécision », voir plus grave de ne pas vouloir « que ses idées prévalent » car ayant refusé de «négocier une alliance de gouvernement sur la base d'un programme minimal».

Aux adhérents du Modem ? Lui, qui prétend refuser «que les militants de l’UDF-MoDem soient sacrifiés aux négociations municipales». Mais question : qui méprise ici l'identité et les valeurs des électeurs du Modem sinon celui qui veut les annihiler et les fondre dans celles, oh combien différentes, de l'UMP ?  Depuis trop longtemps les Démocrates de ce pays souffrent de ne pouvoir avoir un vote qui les représente réellement, et maintenant qu'ils en ont la possibilité, monsieur Cavada veut leur confisquer.

Aux électeurs du XII ème arrondissement ? J.M. Cavada habite Neuilly et sera donc « parachuté » par l'UMP. Il n'a donc aucune attache sentimentale et aucune loyauté envers eux. Mais beaucoup plus grave il est l'instrument du mépris de l'UMP envers cet arrondissement que le parti cherche à conquérir à coup de People. Après Arno Klarfeld pour les législatives de 2007, J.M. Cavada c'est l'estempille « UMP. Vu à la télé » qu'on essaie de refourguer de Bercy à la Nation. Et pour le débat d'idée et les propositions de gestion de la municipalité on repassera.

A ses valeurs ? Mais quelles sont-elles ? J.M. Cavada depuis le début de la campagne présidentielle en 2006 martèle avec le Modem, que nos valeurs sont différentes de celles du PS et de l'UMP. Et alors que N. Sarkozy n'a rien fait d'autre depuis 6 mois que ce qu'on s'attendait à ce qu'il fasse (augmenter son salaire, accroitre les revenus des classes les plus aisés, paralyser la France par des conflits qui auraient pu être évité si le gouvernement n'avait pas attendu 10 jours pour commencer les négociations..), comment J.M. Cavada peut-il voir en lui celui qui veut « rassembler les énergies nationales autour de réformes justes et aider à les négocier équitablement » ? Il n'y a pire aveugle que celui qui ne veut voir...

A ses intérêts personnels ? C'est clairement l'explication. Au delà d'un poste de conseiller municipal et de maire du XII ème arrondissement dont il se contrefiche, c'est un poste gouvernemental qui le motive. Or, rester au Modem, c'est la certitude pour lui de ne pas en avoir avant 5 ans et encore à condition d'une victoire de François Bayrou en 2012. Difficile à vivre...
Alors, une petite OPA sauvage sur les électeurs du Modem de Picpus à Dugommier semble plus rapide, plus facile, plus rentable et tellement plaire au Président distributeurs de portefeuilles ministériels.

La défection de J.M. Cavada c'est donc avant tout le symbole d'une France, pas seulement politique, qui s'accommode du cynisme et des petites magouilles pour faire avancer ses intérêts propres, ses ambitions au détriment du bien public, de la vie politique, de la démocratie. Reste aux électeurs du XII ème arrondissement à montrer leur detestation de ce genre de comportement.

Alexandre Joly

07 novembre 2007

Arche de Zoé : une affaire d'état ?

S'agissant d'une affaire en cours, il n'est pas question ici de faire le procès des membres de cette association, de ceux qui ont travaillé à divers degrès avec elle, ou bien de celles qui se sont retrouvées de facto complices de cette sinistre parodie humanitaire. Les instructions en cours au Tchad et en France le feront.

En revanche il nous est impératif de nous demander comment cette situation a pu se produire et si les pouvoirs publiques avaient ou non les moyens de l'empêcher. Car à la lecture de la chronologie des événements des zones d'ombre plannent sur l'attitude de certaines administrations. En cela, la demande de François Hollande que soit créée une « mission d'information parlementaire » est parfaitement justifiée et même une exigence minimale dans cette affaire qui porte atteinte à l'image et surtout aux intérêts de la France ainsi qu'à tous les humanitaires qui travaillent en Afrique.

En effet si l'opération a pu être stoppé sur l'aéroport d'Abeche ce n'est pas le fruit d'une enquête ou d'un suivi coordonné entre autorités françaises et tchadiennes de l'affaire mais plus celui du hasard, ou plutôt le fait qu'un « couvre-feu dans la région » avait été décrété, et que « le déplacement du groupe a attiré l'attention » comme le signal le journal Le Monde.

On peut ainsi se demander, alors que le Ministère des Affaires Etrangères et notament Brigitte Collet la directrice de cabinet de Rama Yade, Secrétaire d'Etat aux Affaires Etrangères et aux droits de l'homme, étaient au courant de la préparation du projet depuis le 31 juillet 2007 suite à sa rencontre avec Eric Breteau, grand organisateur de l'opération, pourquoi rien a été mis en place pour le contrecarrer ?

Rama Yade a beau clamé haut et fort qu' : "On a alerté, prévenu et mis en garde les autres ministères, nos postes à l'étranger, tout  le monde a été prévenu. Nous avons saisi la justice, que pouvions-nous faire de plus ? ". On peut être surpris quand on sait que les différents aller-retour d'Eric Breteau au Tchad n'ont alerté personne au Quai d'Orsay, que le transport de ses équipes effectuées dans des transports militaires français ont été autorisé par l'ambassade ou que l'ambassadeur au Tchad a appris de la bouche d'un ministre tchadien ce qui se passait. Mais acceptons les explications de Rama Yade. Ce n'est pas la faute de ses services. Mais alors qui ?

Le ministère de la Défense qui a transporté des membres de l'association et leur a ouvert les portes de ses magasins au Tchad pour se ravitailler sans enquêter sur leur mission ? Ou le ministère de la Justice, saisi de l'affaire par un courrier du 24 juillet émanant du Quai d'Orsay et qui a diligenté une enquête préliminaire qui n'aboutit à rien. Ou encore est-ce la faute des fonctionnaires du Ministère de l'Intérieur, ceux de la Brigade de protection des mineurs, qui ont interrogé Eric Breteau le 10 août et l'ont mis en garde contre les aspects illégaux de son opération, laissant toute nouvelle initiative au Parquet ?

Il est indispensable qu'une commission parlementaire fasse la lumière sur cette affaire et pas seulement les ministres Hervé Morin et Bernard Kouchner. Il faut que les responsabilités de chacun soient clairement établies, afin qu'on n'en reste pas sur l'image d'un Nicolas Sarkozy super-sauveur de Français emprisonnés à l'étranger, oubliant les incuries des uns et des autres dans un gouvernement où la qualité première semble plus être la photogénie que la compétence ou le sérieux.

Car une chose est sûre. Beaucoup de monde savait et rien a été fait pour empêcher ce qui d'un point de vue médiatico franco-français est une sinistre farce, mais d'un point de vue plus objectif (et pas seulement tchadien !) n'est rien d'autre qu'un abjecte trafic d'enfant sous couvert humanitaire.
 

Alexandre Joly